Classroom of the Elite Chapitre 22

Une effusion de réflexions

L’heure du petit déjeuner arriva et j’avais fait de mon mieux pour contourner le grand buffet où se trouvait la plupart des élèves. Je me dirigeai ainsi vers la plateforme du bateau. Le café « Blue Ocean » était complètement vide et j’eus l’embarras du choix concernant les places. Je me plaçai ainsi à l’ombre après avoir commandé. Il était 7:55. Mon rendez-vous avec une certaine personne allait commencer dans une minute et je l’attendais avec un visage impassible ?

— Tu es en avance.

C’était ma camarade de classe, Horikita Suzune, une des seules personnes que je pouvais qualifier d’amie dans l’école. Je pouvais aussi qualifier son existence de problématique, car elle en savait trop sur mes capacités réelles. Elle s’assit en face de moi.

Moi — J’attends depuis une heure.

Bien évidemment, je voulais juste un peu la taquiner.

Horikita — Ce n’est pas mon problème, je suis arrivée à l’heure. Même si tu étais arrivé avec 10h d’avance cela ne m’aurait fait ni chaud ni froid.

Bon, je pensais à arrêter de la taquiner, car sinon j’allais me faire du mal.

Moi — Tu ne commandes rien ?

Horikita — Non, pas besoin. Revenons à nos moutons.

Horikita, qui n’aimait pas les discussions triviales, voulait aller droit au but. Elle voulait me raconter ce qu’il s’était passé la veille, de son côté. La seule chose qu’elle m’ait dite avant notre rencontre était le point de rendez-vous.

Moi — Est-ce que les élèves du groupe de 20:40 ont formé une équipe ?

Horikita — Oui, comme tu me l’as dit, il y a douze équipes avec quatre issues possibles et la cible sera choisie aujourd’hui à 8:00. S’il y a des petites différences, je suppose que c’est parce que ce n’est pas le même enseignant qui a expliqué les choses.

Moi — Quelles sont les personnes qui font partie de ton équipe et combien sont-ils ?

J’avais déjà repéré quelques personnes hier, mais je ne voulais pas m’ennuyer à lui dire ça.

Horikita — C’était incroyable, on aurait presque dit qu’il n’y avait aucun hasard et ce n’était pas une coïncidence.

Après m’avoir dit ça, Horikita me montra un bout de papier. Il semblerait qu’elle ait mémorisé les noms des membres de son groupe puisqu’elle les avait recopiés. Le signe de son équipe est Dragon et on pouvait voir les noms des membres de son groupe :

Classe A : Katsuragi Kohei, Nishikawa Ryouko, Shita Shinji, Koharu Yano Classe B : Ando Sayo, Kanzaki Ryuuji, Tsukabe Hitomi

Classe C : Oda Takumi, Suzuki Hidetoshi, Sonoda Masashi, Ryuuen Kakeru Classe D : Kushida Kikyou, Hirata Yousuke, Horikita Suzune

Pour commencer, il semblerait qu’Hirata et Kushida furent les élèves de la classe D choisis pour ce groupe. Ces deux élèves allaient avoir l’honneur de représenter notre classe. Sans prendre en compte l’éternelle solitaire qu’est Horikita, mettre ces deux-là ensemble fut probablement une des meilleures combinaisons de la classe D. Je pensais qu’ils seraient quatre comme dans mon groupe, mais apparemment non.

Kôenji avait de bonnes capacités, mais si on le mettait dans le groupe, je doutais qu’il eût été utile. Honnêtement, je ne sais pas dans quel groupe on l’a mis ou même s’il a fait de l’effort de se rendre au rendez-vous.

Moi —  Je vois… après tout, je pense que cette combinaison était inévitable.

Si je faisais la liste des noms que je connaissais, il y avait Katsuragi de la classe A, Kanzaki de la classe B et Ryuuen de la classe C. C’étaient des gens importants dans leur classe respective. L’équivalent de la « dreamteam » dans le milieu du football.

Moi —  Il y a quelque chose qui cloche.

Si l’intention du lycée était de rassembler les leaders de chaque classe dans l’équipe des Dragons, je trouvai cela étrange qu’Ichinose soit dans celle des Lapins.

Horikita — Tu te demandes pourquoi Ichinose-san est dans ton équipe ? Il n’y a que sa classe qui connaît ses réelles capacités quand on y pense. Ce n’est pas toujours le représentant d’une classe qui assure la fonction de leader.

Moi — Tu fais allusion à toi-même ?

Je pensais que Horikita n’avait pas tort. On ne savait toujours pas de quoi était vraiment capable Ichinose. Ses notes pouvaient être extrêmement basses.

Horikita — Je peux comprendre à peu près pourquoi on a été regroupé comme ça. Toi et Karuizawa-san êtes à peu près pareils au niveau notes. Peut-être qu’ils nous rassemblent selon notre nombre de points ? Mais si c’était le cas, pourquoi Yukimura-kun et Kôenji-kun, qui sont dans les meilleurs élèves de la classe, ne sont pas dans l’équipe Dragon ?

Horikita fit des hypothèses pour comprendre la raison derrière cette répartition en regardant nos résultats en milieu de semestre et lors de l’examen final.

Moi — Tu as raison sur ce point, Sotomura et moi avons des notes similaires… ensuite il y a toi et Hirata.

D’autre part, si nous étions repartis selon nos notes, Kôenji serait sans aucun doute avec Horikita. J’étais sûr que les notes étaient prises en compte, mais je pensais aussi qu’il y avait un facteur inconnu qui jouait un rôle dans les répartitions. J’aimerais bien voir les autres groupes pour me faire une idée.

Horikita — Dans tous les cas, mener son équipe à la victoire ne sera pas une mince affaire.

Évidemment, c’était sûr qu’on rassemblerait ces personnes avec de grandes capacités dans un seul et même groupe. Par contre Horikita et Ryuuen sont aussi compatibles que l’eau et le feu. Je préférai tout de même me taire, car elle risquait de s’énerver si je lui disais ça. Cependant, je pensais que Horikita et Katsuragi pouvaient travailler efficacement ensemble. Leur façon de penser était similaire et leur comptabilité très élevée. Ils feraient la paire.

Horikita — C’est l’heure. Je pense que les messages ne vont pas tarder.

Une fois que l’horloge indiqua 8:00, nos téléphones vibrèrent en même temps. Aussitôt, nous regardâmes le message. Dès que j’eus finis de le lire, Horikita me montra son téléphone et le message reçu. Je fis la même chose pour comparer. On pouvait voir sur le sien :

Après une période de délibération, vous n’avez pas été choisie pour être la cible. L’examen débutera à 13:00 aujourd’hui et s’étalera sur trois jours à partir de maintenant. Si vous faites partie de l’équipe Dragon, veuillez vous rendre dans votre salle au deuxième étage.

Le message d’Horikita et le mien étaient quasiment pareils. La seule différence était le nom de l’équipe.

Moi —  Je suppose que si nous avions été choisis comme cible, les messages auraient été différents.

Horikita —  Il semblerait qu’aucun de nous n’ait été choisi comme cible. Je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer.

Moi —  En étant la cible, selon nos choix personnels, on peut mener notre groupe vers un des quatre résultats.

Être la cible dans cet examen était un énorme avantage. Si elle arrivait à ne pas montrer ses émotions, obtenir 500 000 points minimum était un jeu d’enfant.

Horikita —  Je n’aime pas ça. C’est comme s’ils me disaient que je n’étais pas digne de l’être.

Même après avoir été placée dans un groupe rempli de gros poissons, Horikita pensait toujours être la meilleure. Je suppose qu’elle restait fidèle à elle-même.

Horikita — Dans cet examen, il y a une grande différence entre les élèves choisis comme cible et les autres. Pour les autres, le seul choix qui s’offre à eux est de découvrir l’identité de la cible et il y a toujours une possibilité pour que l’écart entre les classes se resserre.

Elle avait raison. Si la classe D échouait, nos points ne seraient pas dans le négatif. Mais le faible avantage que l’on avait gagné sur l’île déserte pourrait diminuer, voire disparaître selon nos résultats. J’avais déjà commencé à mettre en place une stratégie pour aborder cet examen. Après avoir pris en compte le fonctionnement de ce dernier et mes coéquipiers, j’avais cerné mon objectif.

Moi —  Je ne peux pas prédire ce que feront les élèves que je ne connais pas. Je vais devoir interagir avec eux pour anticiper. Mais j’ai quand même trouvé un moyen de me débarrasser d’eux si nécessaire.

Mais bien sûr ce n’était pas une stratégie que je pouvais faire sur le tas. Je devais d’abord tout bien ficeler et attendre le moment opportun.

Horikita — J’attends tes résultats.

Moi — De même, je suis impatient de savoir comment tu dirigeras ton groupe.

Cepdendant, il y avait toujours quelque chose qui me titillait. La sélection de la cible n’était pas faite au hasard. Les paroles de M. Mashima d’hier m’avaient confirmé cela. Il y a une différence entre ceux qui étaient choisis et les autres.

Horikita — Dans tous les cas j’allais te le demander, mais de qui te méfies-tu le plus dans mon groupe ?

Horikita agissait bizarrement depuis qu’elle avait reçu ces informations, mais après avoir vu avec qui elle ferait équipe, c’était compréhensible.

Moi — Ryuuen.

Horikita — Tu as répondu sans hésitation.

Moi — Il n’y a personne d’aussi louche que lui.

Horikita — Et pourquoi pas Katsuragi-kun ? C’est grâce à lui que la classe A a pu avoir un des meilleurs spots sur l’île. Ce n’est pas anodin. Tu ne trouves pas qu’il est louche lui aussi ?

Moi — Pour quelqu’un en seconde, on ne peut que saluer sa personne. Si tu me demandais qui était le meilleur élève du groupe, je dirais Katsuragi. Mais le plus dangereux est sans doute Ryuuen.

Lors de l’examen précédent, contre toute attente, la classe D avait gagné. Cependant, Ryuuen s’était débrouillé pour sortir la tête haute. En y repensant, cela voulait dire qu’à présent, Ryuuen se méfiait de la classe D. Il fallait à tout prix que mon identité reste secrète. Il ne fallait surtout pas qu’il apprenne que l’on avait réussi à prendre la première place sur l’île grâce à moi.

Horikita — On peut voir que l’identité de la cible est quelque chose qui peut inquiéter, mais après avoir lu le message, je me suis fait une réflexion. Il y a quelque chose qui cloche à propos du message envoyé par l’école. Et le strict…

Avant que Horikita n’ait pu finir sa phrase, je pointai mon index sur sa bouche afin qu’elle arrête de parler. Lorsqu’on parlait du loup, il venait juste d’arriver.

Ryuuen — Tu ne trouves pas qu’il fait beau aujourd’hui, Suzune ? Qu’est-ce que tu manges ?

Deux personnes s’approchèrent de nous avec un grand sourire. Il y avait Ryuuen et quelqu’un d’autre avec lui.

Horikita — Ne m’appelle pas si familièrement, Ryuuen-kun. Et c’est plutôt courageux de te montrer ici, après ce que tu as fait, Ibuki-san.

Horikita s’en était pris à Ryuuen et la fille à côté de lui, Ibuki Mio, qui était dans mon équipe, celle du Lapin.

Les propos de Horikita semblaient avoir irrité Ibuki, mais celle-ci se mordit la lèvre inférieure et se tût. Ryuuen, quant à lui, souriait comme si ça lui avait fait plaisir. Sur l’île déserte, Ibuki s’était infiltrée dans notre classe pour nous espionner mais Horikita découvrit la supercherie et en vint aux mains. Malheureusement, Horikita reçut un gros coup. Elle continuait de me dire que c’était parce qu’elle avait été malade, mais entre nous, on s’en fichait un peu de savoir qui était la plus forte. Ibuki, qui obéissait scrupuleusement, quant à elle, resta silencieuse en nous regardant de façon condescendante  Ryuuen — Le message vient d’arriver ? Tu es la cible ?

Horikita — Je ne te le dirai pour rien au monde, mais peut-être que tu vas nous en dire plus ?

Ryuuen — Si tu insistes.

Ryuuen s’assit sur une place vide.

Ryuuen — Mais avant ça, dis-moi, comment vous avez réussi à obtenir ce résultat sur l’île ?

Horikita — Je n’ai rien à te dire.

Horikita était totalement calme. Il n’y avait aucune animosité dans sa voix. Effectivement, elle avait un très bon jeu d’acteur. Mais Ryuuen n’avait pas l’air d’être irrité par sa réponse sèche.

Ryuuen — Ce n’est pas que ça me préoccupe, mais selon Ibuki tu n’as pas fait grand-chose durant l’examen pour amener ta classe à la victoire.

Horikita — Ce n’est pas une sotte, telle qu’Ibuki, qui pourrait réussir à me comprendre. J’économisais simplement mes forces à cause de la fièvre.

Ibuki se leva aussitôt.

Ibuki — Tu veux ta revanche ? Faisons un autre combat, ici et maintenant ! Battons-nous ! Allez !

Mais Horikita n’accepta pas son défi.

Horikita — Malheureusement, je vais devoir décliner. La violence est contraire aux règles de l’école, encore plus durant cet examen. Si tu utilises la violence contre moi, je le rapporterai au staff sans hésiter. À toi de voir.

Ibuki se dirigea furieusement vers Horikita, mais s’arrêta net, n’osant plus poser la main sur elle. Utiliser la violence ici était prendre le risque de subir des sanctions de la part de l’école. Ibuki comprit qu’elle ne pouvait pas se laisser aller à ses envies, car elle servait Ryuuen avant sa personne et elle ne pouvait pas agir sans son consentement. Elle était talentueuse et c’était pour cela que ce dernier l’avait choisie comme espionne.

Ryuuen —  Comme nous sommes tous ici, prenons un café.

Horikita joua le jeu et commanda un café. Je fis de même. Ryuuen n’avait pas l’air de vouloir partir et voulait même continuer la conversation.

Ryuuen — Katsuragi avait l’air de se méfier de vous, hier.

Horikita —  Ce n’est pas étonnant, il n’aurait jamais cru que quelqu’un de classe D comme moi serait capable de ça. Ce n’est pas pour cela que tu es ici avec Ibuki ? Vous êtes sur vos gardes maintenant.

Ryuuen — Hé hé. Ce serait inutile de te mentir. Bien évidemment, je suis ici pour te jauger en personne.

Horikita buvait son thé.

 

 

Ryuuen — Tu devrais aussi savoir que mes méthodes sont différentes de celle de Katsuragi, une fille sérieuse comme toi serait incapable d’élaborer une telle stratégie.

Horikita — Je n’ai que faire de ton avis. Connais-tu seulement la stratégie que j’ai adoptée durant l’examen ? Non ! Tu n’as pu voir que les résultats.

Contrairement à Horikita qui était de marbre, Ryuuen souriait. Son visage semblait dire « Katsuragi n’a pas su voir à travers votre jeu mais moi oui ! »              Horikita — Je me demande bien si tu as réussi à la comprendre.

Ryuuen se mit à rire, cette fois.

Ryuuen — À la fin de l’examen, lorsque l’on a dû écrire le nom des leaders, la seule raison pour laquelle nous nous étions trompés était parce que vous aviez changé de chef en cours de route.

Horikita — Ce n’est pas sorcier. N’importe qui aurait pu comprendre cela en y réfléchissant un peu, même Katsuragi que tu viens de railler. Ryuuen — Je ne suis pas d’accord. Il pense que tu as tout planifié. Mais de mon point de vue, même toi n’aurais pas été capable de prédire que tu serais le leader ou bien que tu devrais te retirer juste avant la fin de l’examen.

Horikita — C’était juste une assurance en cas d’imprévus. J’ai tout planifié après qu’Ibuki-san se soit infiltrée dans notre classe. Il n’y a rien d’extraordinaire dans ce que tu viens de dire.

Ryuuen — En tout cas, pour moi, c’est celui qui a pris ta place au dernier moment en tant que leader qui tire les ficelles depuis le début.

Ryuuen dit cela en regardant Horikita, mais en me regardant aussi comme si j’étais derrière elle. Je ne savais pas à quel point il avait confiance en ce qu’il disait. Mais s’il me soupçonnait, j’allais alors être à coup sûr dans son collimateur.

Je ne sais pas de quoi tu parles, je n’ai déjà aucun ami pour

comploter quoi que ce soit. La seule personne avec lequel j’ai une certaine affinité est Ayanokôji-kun. Mais c’est plus un poids qu’un ami. Il faut dire qu’il n’est pas très enclin à aider autrui.

En attirant l’attention sur moi, elle réussit à me faire passer pour quelqu’un de passif, qui n’avait aucune prise de décision dans les grandes stratégies.

Horikita — Mais si tu veux croire qu’il tire les ficelles, grand bien te fasse.

Ryuuen — Je vois.

Ryuuen me regarda avec de grands yeux.

Il semblerait que notre supercherie avait fonctionné, car Ryuuen ne me considéra plus. Réussir à me soupçonner à travers les actions de Horikita, alors que celle-ci est brillante dans tous les domaines, que ce soit au niveau académique, physique ou oral, forçait le respect. En effet, quelqu’un de normal se serait basé sur des données concrètes pour évaluer le niveau de menace de quelqu’un, et donc tout naturellement soupçonner Horikita en premier lieu. Cependant, bien que les choses ne se soient pas déroulées pas selon son plan, Ryuuen gardait le sourire.

Ryuuen — C’est vraiment dommage, je pensais enfin avoir trouvé une personne qui pensait comme moi. Mais vous avez agi bien trop tôt. Vous auriez dû utiliser votre carte maîtresse pour l’examen que nous passons actuellement. Suzune, si tu croises ton maître à penser, transmet lui ce message.

Horikita — Merci pour le conseil.

Ryuuen — Pas besoin de me remercier.

Horikita — Tu penses vraiment qu’il y a quelqu’un qui tire les ficelles ?

Ryuuen resta muet. Il devait être sûr de ce qu’il avançait même s’il n’avait aucune preuve ou confirmation du côté de Horikita. Après tout, Ryuuen croyait plus en lui que n’importe qui et n’était pas le genre de personne à se faire conseiller. Il avait l’air d’avoir digéré cet échec et trouvait un malin plaisir à discuter avec Horikita.

Tout à coup, il sortit son téléphone et prit une photo d’elle sans sa permission.

Ne me prends pas en photo !

Ryuuen — Ne dis pas ça voyons. Je vais te dire quelque chose d’intéressant. Il dit cela en regardant la photo de Horikita.

Ryuuen — Il y a une autre personne dans la classe D qui se camoufle et qui fait les choses en secret.

Horikita — Tant mieux ! Je n’allais pas tout faire non plus. C’est une bonne chose qu’il y ait des gens autonomes en classe D.

Ryuuen — Dans tous les cas, je suis content d’avoir pu te parler, Suzune.

Je trouverai à coup sûr celui qui tire les ficelles.

Horikita — J’ai juste une chose à te demander. Je comprends que tu te méfies de moi, mais pourquoi tu en fais une obsession ? Tu ne t’intéresses pas aux autres justement ? Comme Ichinose-san de la classe B ou Katsuragikun dans la classe A ? Et je ne parle même pas de la fameuse Sakayanagi en classe A aussi. C’est plutôt sur eux que votre classe devrait se concentrer. Si ton but était de me dire quelque chose d’intéressant, répond au moins à ça.

Ryuuen — C’est parce que je connais plus ou moins leurs capacités et qu’aucun d’eux n’est de taille à m’affronter. Si je voulais les écraser, je pourrais le faire n’importe quand.

— Et que penses-tu de Sakayanagi ?

La personne ayant posé cette question n’était pas Horikita, mais Ibuki. Il semblerait que même Ibuki voulait avoir une confirmation de la part de Ryuuen. Ryuuen, qui répondait jusque-là sans hésiter, marqua une pause.

Ryuuen — Je garde cette fille en dernier, ce sera mon dessert. Ce serait du gâchis de la manger tout de suite.

Ryuuen et Ibuki se levèrent en même temps et disparurent au loin.

Moi — Tu n’as pas l’air contente.

Demandai-je alors que Ryuuen s’en allait.

En effet. Tu t’es trop mis en avant durant l’examen sur l’île. N’oublie pas que notre objectif est d’atteindre la classe A. Je suis celle qui est censée attirer l’attention.

Moi — Tu n’as pas tort, mais n’oublie pas que c’est Ryuuen, il est imprévisible.

Je me doutais, avant même qu’il vienne nous parler, que Ryuuen me soupçonnait. C’était même la seule chose dont j’étais sûr à propos de lui. Je ne savais pas à quoi il pensait, mais le timing de son apparition aurait pu nous porter préjudice.

Moi — Il nous espionnait peut-être depuis le début, car il est vraiment apparu au bon moment.

Peut-être qu’Ibuki est impliquée. Le fait qu’il soit venu avec elle peut signifier qu’elle tentera de rassembler des informations sur nous, comme elle est dans mon groupe.

Horikita — Je doute qu’on te suspecte d’être celui dans l’ombre. La réputation que tu t’es faite pendant le semestre est celle de quelqu’un d’assez difficile à approcher.

Je ne savais pas si je devais prendre ça comme un compliment ou une insulte, mais elle avait raison. Peu importe ce qu’on cherchait sur moi, il n’y avait rien de spécial à trouver. Normalement, aucune personne saine d’esprit n’abaisserait son propre niveau juste pour se fondre dans la masse. Cependant, le fait que je sois proche de Horikita avait attiré l’attention sur moi. Qui plus est, Ibuki faisait partie de mon groupe, alors j’étais sous surveillance. Dès que je vis des élèves arriver sur la plateforme, je me levai.

Moi — La discussion est finie pour l’instant. Je retourne dans ma chambre pour dormir.

Horikita — Oui, nous n’avons plus rien à nous dire. Tout ce que nous avons à faire est d’aller dans nos groupes respectifs. Bonne chance. N’oublie pas de m’envoyer un message s’il se passe quelque chose.

Au moins, j’avais pu voir que Horikita avait beaucoup de répondant et ne se laissait vraiment pas faire face aux agressions extérieures. De toute manière, même

 

si elle n’était pas en super terme avec Hirata et Kushida, ils seraient capables de la soutenir en cas de besoin. Tout ce qu’il me restait à faire était de dormir un peu. Même si l’examen avait commencé, il n’y avait rien à faire entre temps.

1

Sotomura — Désolé de vous avoir fait attendre, Geppu, Geppu. Je suis sûr que si vous aviez mangé trois repas pour le déjeuner vous seriez rassasiés comme moi. J’ai pensé à faire un régime, mais j’ai succombé.

Sotomura était venu vers moi, en se frottant le ventre rempli par tout ce qu’il avait mangé plus tôt. Il ne donnait pas l’image de quelqu’un qui voulait faire un régime.

Yukimura — C’est dommage que l’examen ait commencé, j’ai à peine mangé.

Sotomura — Tu nous fais genre le flag[1] du gars qui ne peut pas utiliser toute sa puissance s’il ne mange pas ?

Yukimura — Cela fait longtemps que je voulais te le dire, mais si tu pouvais éviter de parler comme ça, ce serait vraiment sympa.

Il faut avouer que si on ne connaissait pas bien Sotomura, ses mots pouvaient être perçus comme de la sorcellerie. J’imagine qu’il fallait avoir l’habitude. Mais d’un autre côté, parler d’une façon originale pouvait être intéressant. Par contre, si je m’étais immiscé dans leur discussion, cela aurait pu énerver Yukimura, donc j’avais préféré ne rien dire.

Sotomura — Pofu. Tu n’aimes pas ma façon de parler. Comment voudraistu que je parle alors ?

Yukimura — Parle juste normalement, un point c’est tout.

Sotomura — Très bien, à partir de maintenant je serai une personne faible en apparence, mais qui cache son jeu. En temps normal, je n’ai aucune motivation, mais en réalité, j’ai le pouvoir de détruire le monde, ce qui me rend digne de porter le nom de « Jesuischeaté-kun ».

Arrivé à ce stade, Yukimura sembla avoir abandonné l’idée de raisonner Sotomura et marcha simplement devant nous. Comme nous n’étions pas en avance, nous nous dépêchâmes de rejoindre notre destination.

Sotomura —  Ayanokôji-kun, je dois te demander quelque chose. Il faut que tu me répondes sincèrement.

On aurait dit une réplique de film au vu du ton grave qu’il avait.

Moi — Que veux-tu savoir ?

Sotomura — Je me demandais quel était ton dialecte favori, je me disais que tu serais content si j’employais à ton égard un langage mimi !

Il employa cette fois un ton mignon. C’était comme si c’était une fille qui était venue de me parler, mais cela restait du Sotomura.

Moi —  Je n’ai pas vraiment de dialecte préféré.

Je suis né à Tokyo après tout, je ne suis pas familier avec ces dialectes.

Sotomura — Tu n’as jamais eu la chance connaître le dialecte « Moe » ? Mais avec combien d’élèves croyait-il avoir des références communes ? J’aurais pu me taire jusqu’à ce que l’on arrive devant la salle. Mais je préférai passer le temps en parlant avec lui.

Moi — C’est quoi ton « dialecte » préféré à toi ?

Sotomura — Je vais te donner mon classement. En troisième place ce serait le dialecte du Kansai. C’est assez formel, mais tu te sens viril. La seconde place irait pour la beauté enneigée, à savoir, le dialecte de Hokkaido. C’est un dialecte largement répandu dans le monde 2D ce qui fait de lui un dialecte labellisé “Moe”.

J’avais dit que je voulais passer le temps en parlant avec lui, mais je ne comprenais absolument rien à ce qu’il disait. Avant que je ne pûs répondre, Sotomura siffla une étrange onomatopée « doururururururu ».

Sotomura — Le premier du classement est celui que les Lolis utilisent de temps à autre, le dialecte de Hakata. Il est considéré comme le dialecte ultime avec pas mal de mots d’argot. Ce sont les trois dialectes de mon cœur.

Malheureusement je ne comprenais pas ce qu’il essayait de me transmettre bien que je voyais la passion qui l’animait. Au moins, il avait réussi à me distraire puisqu’au moment où il finit de parler, nous étions devant la salle. Sur la porte, nous pouvions voir le nom de notre groupe (Lapin). Comme l’examen avait déjà commencé, le couloir était bondé d’élèves ce qui me donna l’impression d’être claustrophobe.

Yukimura — La fête est finie. À partir de maintenant, on devra se battre pour notre bien et celui de notre classe.

Ces mots furent adressés à Sotomura, mais j’hochai la tête.

— Aaah… J’ai beau y repenser encore et encore, je ne peux pas m’empêcher de me dire que mon groupe n’est pas terrible.

Cette remarque venait d’une des filles qui venait de rentrer dans la salle, elle nous avait regardés en soupirant. C’était une des plus belles nanas de la classe D (bien qu’un peu trop bruyante), Karuizawa Kei. Il y avait onze personnes avec elle dans la salle, toutes assises sur des chaises qui étaient disposées de façon circulaire. Après avoir vu le nombre de chaises vides, j’en déduisis que nous étions les derniers. Je n’aurais pas été capable de les reconnaître même avec la liste, mais parmi eux se trouvaient quelques élèves, autre qu’Ichinose et Ibuki, que je reconnaissais. Notamment cet élève de la classe A qui m’avait proposé une alliance pour saboter la classe D. Cependant, la majorité d’entre eux m’étaient inconnus. Nous qui étions rivaux hier, étions obligés de coopérer aujourd’hui dans cet examen que tout le monde trouvait étrange. Nous avions préféré nous asseoir parce que rester debout aurait attiré l’attention sur nous. Les étudiants s’asseyaient instinctivement près des personnes de leurs classes, mais Karuizawa et Ibuki s’étaient mises à l’écart comme si elles cherchaient à s’isoler du groupe.

Sotomura — Qu’est-ce qu’il y a ?

Yukimura — Tu as remarqué quelque chose, Ayanokôji ?

Moi — Tout va bien.

Je pensais que Karuizawa s’en serait pris à Ibuki dès qu’elle l’aurait vue. Après tout, c’était Ibuki Mio qui lui avait volé ses sous-vêtements sur l’île. Je m’étais dit qu’elle voudrait se venger, mais peut-être que Karuizawa était plus mature qu’elle en avait l’air, ou bien elle s’était déjà vengée. Peu importe, je trouvais cela étrange qu’elle n’ait même pas l’air contrariée. Avant que je puisse réfléchir à ces questions, le haut-parleur se fit entendre :

— À partir de maintenant, la première réunion d’équipe peut commencer ! L’annonce fut assez brève. Comme on ne se connaissait pas vraiment, personne n’osait prendre l’initiative d’entamer la discussion. Un certain malaise envahit la salle. Soudain, Ichinose Honami se leva avec un sourire radieux après avoir vérifiée que personne ne prendrait la parole.

Ichinose — Je connais la plupart des personnes ici, mais j’imagine que d’après les instructions de l’école, nous devrions quand même nous présenter. De plus, il y a sûrement des personnes qui ne se connaissent pas.

Elle s’adressa à tout le monde. Ce n’était guère facile d’être le leader d’un tel groupe, car celui-ci se devait d’inspirer ses camarades, d’effacer les rivalités entre les classes afin de faire cause commune. Mais cela n’avait pas l’air de déranger Ichinose, elle avait même l‘air d’apprécier d’avoir à prendre les rênes. Les élèves de la classe A étaient assez surpris de la voir prendre en main le groupe.

Machida — Je ne pense pas que ce soit utile. L’école a juste dit cela par formalité. Ceux qui veulent se présenter le feront.

Ichinose — Si tu ne veux pas te présenter, je ne vais pas te forcer. Mais imaginons qu’il y a des caméras cachées ici. Si nous ne suivons pas les instructions de l’école, cela ne sera pas que toi, mais tout le groupe qui sera pénalisé.

Ichinose répondit directement à Machida. En effet, être égoïste pouvait grandement pénaliser le groupe. En disant cela, Machida de la classe A fut obligé d’accepter son raisonnement. Elle commença par se présenter.

Cela me fit penser à mon premier jour dans cet établissement, j’avais raté ma présentation. Lorsque vint mon tour, ma prestation fut la même que la dernière fois, un ton terne et monotone.

Ichinose — Salut, Ayanokôji-kun ! On est dans le même groupe cette fois ! Profitons-en pour travailler ensemble comme il se doit !

Ichinose m’interpella avec une voix amicale lorsque je me rassis. Une fois que tout le monde se présenta, Ichinose se leva une fois encore.

Ichinose — Maintenant que nous avons fini les formalités, est-ce que vous avez une idée de comment on pourrait procéder maintenant ? Si des gens ne veulent pas que je sois le leader, vous pouvez vous manifester.

Ichinose l’avait énoncé comme si elle demandait à quelqu’un de prendre sa place. Ainsi, en le disant comme cela, personne n’avait osé la remplacer. Il y avait sûrement des élèves qui n’aimaient pas sa façon de faire, mais la responsabilité de leader était trop lourde pour leurs épaules, donc tous préférèrent se taire.

Ichinose — Vous ne voyez donc aucune objection à ce que je prenne le rôle de leader ? Tout d’abord, je pense que l’on devrait discuter des aspects de l’examen que nous n’avons pas compris pour ne pas laisser l’ambiguïté s’installer.

Ichinose avait ainsi proposé le premier sujet de discussion. Il n’y avait aucune réticence de la part du groupe face à sa proposition, et aucune voix ou main levée contre elle. Généralement, dans un groupe constitué où tout le monde était étranger, si une personne pouvait agir sans craindre la moindre opposition, c’était le signe qu’elle était un véritable leader. Ichinose posa ses mains sur ses hanches, avant de nous faire un grand sourire.

Ichinose — Je vais vous poser une question très simple en admettant que personne n’est la cible. Est-ce que vous voulez coopérer afin d’obtenir l’issue 1 ? Pensez-vous que c’est la meilleure option ?

— Hein ? Qu’est-ce que tu veux dire ? C’est évident, non ?

Karuizawa était celle qui lui avait répondu. Le prochain qui allait parler pourrait décider de sa place dans la hiérarchie du groupe. Mais je ne pense pas qu’elle avait réfléchi à ça. Yukimura et une fille de classe C, s’appelant Manabe, semblaient l’avoir compris, car tous deux essayèrent de prendre la parole de suite, si bien qu’ils le firent en même temps. Dans la logique il était évident que les élèves pencheraient pour l’issue 1 et pour montrer qu’il était d’accord avec Ichinose, un des élèves de la classe B cette fois leva sa main. Si je me souvenais bien du nom qu’il avait donné pendant sa présentation, c’était Hamaguchi Tetsuya.

Hamaguchi — Je suis d’accord avec elle, coopérer en tant que groupe est la meilleure chose à faire. Même si nous venons de classes différentes.

Pour être honnête, ce n’était pas une mauvaise façon de commencer la discussion. Certains élèves ne l’avaient probablement pas remarqué, mais en commençant la discussion par une question évidente, il est possible de cerner qui n’est pas la cible en favorisant une attitude positive parmi les camarades du groupe. À condition de bien le faire, on pouvait carrément trouver l’identité de la cible rien qu’à ce niveau de l’examen. Ichinose, celle qui avait posé la question. Karuizawa, celle qui lui répondit en premier. Ou même Yukimura et Manabe qui l’ont directement suivie. Sans oublier Hamaguchi de la classe B. Ce ne serait pas étonnant qu’une de ces cinq personnes soit la cible. Je me joignis à eux pour ne pas ruiner la bonne atmosphère qui venait de s’installer.

Moi — Nous, la classe D, nous n’avons pas beaucoup de points. Je voudrais coopérer si c’est possible. Qu’est-ce que t’en penses, Sotomura ?

Il avait l’air de vraiment souffrir, il se frottait le ventre. Lorsque je l’interpellai, il sursauta.

Sotomura — Bien sûr, je veux bien coopérer si c’est pour recevoir des points.

J’avais l’impression que Sotomura essayait de rester calme malgré la situation. Je me mis à observer la situation avec plus de recul, et ce fut là que je remarquai que les élèves de la classe A n’étaient que des garçons. Ceux-ci avait l’air de

nous observer pour voir dans quelle direction irait le groupe.

Machida — Ichinose, ce n’est pas juste. Tu as formulé les choses de sorte de rassembler tout le monde face à la cible qui est d’emblée mise en porte

à faux. C’est comme si tu voulais la faire se sentir coupable de ne pas révéler son identité. Tu as posé les choses de manière très inappropriée je trouve.

Son attitude était à l’opposé de celle des élèves de la classe D et C, qui étaient de suite allés dans le sens d’Ichinose. C’est comme s’il avait attendu une fenêtre de tir pour pouvoir la critiquer. Hamaguchi, qui avait entendu les remarques de Machida, répondit calmement.

Hamaguchi — C’est une question tout à fait normale qu’elle a posée. Ichinose-san n’a forcé personne à parler ou à divulguer des informations. Si tu ne veux rien dire, tu as le droit de te taire.

Hamaguchi stoppa les critiques de la classe A. Ainsi, Un conflit interne déchirait déjà l’équipe Lapin. Machida, qui n’avait pas l’air impressionné par la réponse d’Hamaguchi, avait comme anticipé sa réaction.

Machida — En effet, nous avons le droit de garder le silence. C’est donc ce que moi et mes camarades allons faire. Nous allons rester silencieux.

Machida rejeta la coopération et ses camarades le suivirent ainsi que d’autres qui préféraient garder le silence.

Ichinose — Peut-être y suis-je allée un peu trop fort avec cette question ?

En réaction à ce rejet, Ichinose sourit amèrement.

Hamaguchi —  Non, Ichinose-san. Ta question n’avait rien d’inapproprié. Je suppose qu’ils sont un peu trop méfiants. Dis-moi, Machida-kun. Quelle question aurais-tu considéré comme appropriée ? Bien sûr, on aurait pu

parler de choses banales comme notre nourriture favorite, nos passions, etc. Mais je doute de la pertinence de la chose. Cela signifie que tu n’as rien à apporter au groupe excepté ton silence.

Machida — Rien à apporter ? Balivernes !

Hamaguchi — Moi-même je ne sais pas ce que voulait faire Ichinose-san avec cette question, mais tout ce que je sais, c’est que la discussion dans le groupe est essentielle. Si tu veux rester muet, nous n’aurons pas d’autres choix que de continuer la discussion en ignorant la classe A. Au moins, vous pourriez nous aider à choisir le premier sujet de discussion.

Hamaguchi avait raison, garder le silence ne nous faciliterait pas la tâche, et Machida devait bien le savoir. Malgré cela, il resta les bras croisés sans parler. Ichinose intervint, tentant de briser la glace.

Ichinose — J’imagine qu’on va devoir choisir le leader en votant. Les personnes qui refuseront de répondre seront sans doute considérées comme suspectes, mais nous parlerons de la cible plus tard. Est-ce que tout le monde est d’accord ?

Ichinose, avec ses mots, brisa la forteresse que représentait la classe A. Horikita pensait comme Ichinose, sauf qu’Ichinose pouvait facilement rallier des personnes à sa cause. Se battre en ayant le soutien des personnes lui donnait vraiment un gros avantage. Grâce à son intervention du début, Ichinose avait déjà la majorité des voix. Aussi loin que je m’en souvienne, je ne voyais personne capable de réaliser une telle prouesse. Katsuragi et Ryuuen ne le pourraient pas. Hirata et Kushida non plus.

Machina — Est-ce que tu nous menaces ?

Ichinose — Non, il y a erreur. Nous voulons juste parler avec vous. Vous êtes libres de décider de ce dont vous voulez ou ne voulez pas parler. Je voudrais que les gens participent à la conversation, comme c’est une des consignes de l’examen.

Machida n’avait pas l’air de la comprendre et parla dans sa barbe.

Machida — Tu crois vraiment que l’on peut finir juste en parlant ? Tu crois vraiment qu’on trouvera la cible en parlant ? Ou bien tu vas te mettre à genoux et supplier la cible pour qu’elle se montre ?

Je croyais que la classe A avait déjà choisi sa stratégie, mais je ne pensais pas que cela soit l’initiative de Machida. Je croyais cependant avoir compris qui le manipulait.

Ichinose — Donc il y a un autre moyen ?

Ichinose demanda la chose à Machida d’une façon déterminée, sans une once d’hésitation dans sa voix. Mais la classe A s’attendait déjà à cette question.

— Oui, il y a un autre moyen de finir cet examen.

Un des élèves de la classe A parla. Ichinose et Hamaguchi ne pouvaient pas cacher la surprise sur leur visage.

Ichinose — Pourrais-tu l’expliquer ?

Élève (Classe A) — Bien sûr, nous sommes une équipe, il est donc naturel de s’entraider. Machida, enfin, la classe A est venue avec une stratégie très simple. Celle de ne pas parler jusqu’à la fin de l’examen.

Il le dit assez fort, pour que ceux qui n’étaient pas près de lui puissent l’entendre. Il semblerait que Karuizawa et Sotomura avaient compris là où il voulait en venir.

Hamaguchi — C’est une stratégie insolite. Mais comment comptez-vous finir l’examen sans parler ? Ou bien préférez-vous que l’identité de la cible reste cachée jusqu’à la fin ?

Machida — Le vrai raccourci pour terminer cet examen de la meilleure des manières est de le faire sans parler.

Hamaguchi — C’est incroyable… Vous allez finir par nous faire penser que la cible se cache parmi les élèves de la classe A et que vous essayez de la protéger.

Évidemment, si la cible était dans leur classe, il était évident qu’ils auraient préféré ne pas avoir à parler. Ainsi, il était normal qu’à présent, Hamaguchi, ainsi que tous les autres, se méfiaient d’eux.

Machida —  La classe dans laquelle se trouve la cible importe peu, cela ne changera pas le résultat. Si nous ne parlons pas, nous pouvons gagner. C’est la stratégie que Katsuragi a élaborée pour nous.

Ichinose —  Katsuragi-kun ? Je vois…

Ichinose comprit tout lorsque Machida mentionna le nom du leader de la classe A. Machida se tourna vers Yukimura, qui n’avait pas l’air d’avoir compris son explication et commença à expliquer la stratégie.

Machida — Il n’y a que quatre résultats possibles dans cet examen. Vous les connaissez déjà. Quel est le résultat que l’on devrait tous éviter dans cet examen ?

Machida se retourna vers Karuizawa en lui posant la question.

Karuizawa — Euh… l’issue où une personne démasque la cible et trahit le groupe ?

Machida — Exactement, on peut considérer que le groupe a perdu si un traître se révèle, que sa réponse soit vraie ou fausse. En effet, nous sommes pénalisés dans les deux cas. Mais si on se penche sur les autres issues ?

Machida posa cette question à Yukimura.

Yukimura — Les autres issues ? Comme les deux premières ?

Machida — Effectivement, il n’y a pas de points négatifs pour les deux premiers résultats. Les points de la classe n’augmenteront pas, mais ils ne baisseront pas non plus de façon drastique. De plus, nous gagnerons un montant important de points. Le seul perdant serait le corps administratif puisqu’on ne jouerait pas le jeu de l’examen en essayant de trouver la cible. Si on commence à discuter, on finira par se suspecter les uns les autres d’être la cible. Et on finira par faire une erreur.

Hamaguchi — Je reconnais l’ingéniosité de ce plan d’un certain point de vue, mais tant qu’on ne connaîtra pas la classe de la cible, il y a toujours le risque que l’écart entre les classes se creuse encore plus. Si la cible fait partie d’une classe et la favorise, même si les points de la classe ne sont pas affectés, on sait tous l’impact que des points privés peuvent avoir.

Hamaguchi avait raison, les points personnels étaient très utiles. Par exemple, on pouvait acheter des notes ou même changer de classe suivant la façon dont on les utilisait. Il avait raison lorsqu’il disait que la cible pouvait choisir d’avantager sa classe. Mais c’était inutile de le rappeler à la classe A, Katsuragi avait sûrement déjà compris les propos de l’examen. Ils ne nous auraient pas imposé cette stratégie sinon.

Machida — Réfléchis un peu, le lycée ne pénaliserait aucune classe dans un examen comme cela. Le corps administratif a bien souligné leur impartialité avant le début de l’épreuve. C’est sûr et certain qu’il y a une cible par groupe, mais ce n’est pas important. Ce qui est important, c’est que toutes les classes ont des chances égales d’avoir une cible. La classe A et la classe D ont commencé cet examen sur un pied d’égalité.

Ceux qui défendaient la stratégie de Katsuragi rejetteraient la discussion pour que les points soient alloués équitablement, peu importe la classe de la cible. Mais Hamaguchi trouva directement une parade.

Hamaguchi — Tu as raison lorsque tu dis que le lycée veut que nous soyons tous égaux. Si vous prenez leurs mots au pied de la lettre, vous n’avez pas tort. Mais on ne peut pas en être sûr, il faut en avoir le cœur net.

Il avait parfaitement raison, bien que ça n’était pas très évident à saisir, mais Hamaguchi avait fait de son mieux pour se faire comprendre. C’était dans l’intérêt de l’école de faire les choses avec impartialité, mais il fallait toujours être prudent.

Machida — Tu comprends bien les choses, mais en discutant, on finira par se suspecter les uns des autres, et cela pourrait nuire à l’unité de l’équipe. Bien sûr que c’est possible de trouver la cible comme ça, mais il y a aussi le risque qu’un traître arrive mettant à mal toute l’équipe.

Ichinose — Tu as raison, ce n’est pas une si mauvaise chose de faire en sorte que l’on gagne tous en ne jouant pas le jeu.

Ichinose l’avait dit comme si elle avait accepté la stratégie de Katsuragi. Machida nous regardait comme s’il voulait nous dire que c’était lui qui avait proposé cette tactique, mais Ichinose n’avait pas l’air de vouloir mettre en place cette stratégie.

Ichinose — Mais mettre en place ce plan sera difficile, peut-être plus difficile que si nous devions discuter. « Je ne parlerai pas, je ne douterai pas, je ne trahirai pas ». À moins que tous nos camarades ici n’adoptent cette stratégie, elle ne sera pas efficace. Comme l’école garantit un anonymat pour les élèves, l’honnêteté est une solution. Ce serait bien si les points pouvaient être distribués équitablement entre nous, mais il y a le risque qu’une personne abuse de ce silence et qu’elle soit malhonnête en gardant les points pour elle-même.

Dans ce cas, cela voudrait dire qu’un élève d’une classe gagnerait des points, mais cacherait à sa classe qu’il était une cible. Le plan de Katsuragi était de rester sur la défensive, un peu comme s’il fallait placer des barrières. Mais sa stratégie requérait la coopération de tout le monde, ce qui n’était pas chose aisée. Pour adopter sa tactique, il suffisait de se taire, ce que tout le monde normalement pourrait faire. On pourrait même se dire que cette stratégie contrecarrait les plans de l’école en rendant cet examen absurde.

Sotomura — Je n’y vois aucun inconvénient. Une fois que cet examen sera fini, nous pourrons parler dans nos classes respectives et partager les points de l’examen.

Les élèves de la classe C avaient l’air d’être du même avis que Sotomura, particulièrement une fille du nom de Manabe.

Yukimura — J’adhère aussi, tant que l’on peut partager nos points après l’examen, ça me va. C’est mieux que d’encourir le risque qu’un traître se révèle et sabote notre équipe. C’est très peu probable que l’on trouve la cible rien qu’en parlant.

Yukimura était plongé dans ses pensées lorsqu’il avait dit cela, mais il ne fit aucune objection face à cette stratégie. Après avoir vu que l’opposition s’était essoufflée, Machida ricana légèrement.

Ichinose — Je vois.

Ichinose disait cela les bras croisés en regardant sa classe, puis la classe D et la classe C.

Ichinose — J’aimerais connaître l’avis de toute l’équipe Lapin. Si vous voulez adopter cette stratégie, levez la main.

Yukimura et Sotomura de la classe D et après un petit temps d’hésitation certains élèves de classe C levèrent la main.

Ichinose — Qu’est-ce que t’en penses, Ibuki ?

Ibuki — Je n’ai pas d’avis, faites comme vous voulez.

Ibuki n’avait pas l’air de vouloir s’impliquer davantage à ce stade de l’examen. Elle était différente de ses trois autres camarades de la classe C. Manabe et les autres n’avaient pas l’air surpris donc elle agissait sûrement comme cela d’habitude.

Ichinose — Je vois, d’accord. Et toi, Karuizawa ?

Karuizawa — Vraiment, ça me gave tout ça. Ce n’est pas comme si on était sûr d’obtenir le meilleur résultat en discutant de toute façon, n’est-ce pas ? Je veux juste que cet examen se termine pour que je puisse retourner à ma vie normale.

Bien que Karuizawa disait ce qu’elle pensait, des camarades se reconnurent en elle.

Ichinose — Toi, Hamaguchi-kun, t’en penses quoi ?

Hamaguchi — Je préfère te laisser trancher.

Il lui répondit directement. La confiance que les élèves avaient en Ichinose était indéfectible. Les deux autres élèves de la classe B hochèrent la tête pour acquiescer.

Ichinose — Tu es le dernier, Ayanokôji-kun, que choisis-tu ?

Ichinose se tourna vers moi, le dernier qui n’avait pas donné son avis.

Moi — La stratégie n’est pas mauvaise et la majorité est d’accord pour l’adopter. J’ai du mal à parler devant les gens de toute manière.

J’allais ainsi dans le sens de Katsuragi, mais je ne pensais pas qu’Ichinose avait dit son dernier mot. En effet, si la classe B décidait de se plier aux règles de la classe A, son futur serait bien sombre. Il y avait quelque chose dans la stratégie de Katsuragi qui ne pouvait pas être accepté.

Machida — Eh bien, on est bons je présume.

Ichinose — Attends. Ta stratég… non, la stratégie de Katsuragi n’est vraiment pas mauvaise, il n’y a aucun doute là-dessus. Je peux comprendre pourquoi tout le monde veut l’adopter. C’est vrai qu’il y a très peu d’inconvénients dans cette stratégie. Mais si on y repense, c’est parce que vous faites partie de la classe A que vous pouvez vous permettre de proposer ça et c’est le gros point faible de cette méthode.

Ichinose avait refait surface comme un sous-marin en ayant fait un gros splash.

Yukimura — Un point faible ?

Yukimura n’avait pas autant creusé qu’Ichinose.

Ichinose — En effet, en partant du principe que chaque classe à des chances égales d’avoir la cible, ne pas parler est le meilleur moyen de tous obtenir beaucoup de points. Il n’y a que des avantages dans cette stratégie. Par contre, c’est injuste par rapport aux autres classes de gâcher leurs chances.

Machida — Que ?!

Ichinose — Nous ne savons toujours pas combien il reste d’examens avant la remise des diplômes. Actuellement, l’écart entre la classe A et les autres classes est important. La stratégie de collaboration entre les classes a été évoquée pendant l’examen sur l’île. Autrement dit, chaque fois qu’il y aura un examen, la classe A utilisera cette stratégie pour conserver sa place dans la hiérarchie jusqu’à la remise des diplômes.

Le visage de Yukimura se resserra après son explication, comme s’il se demandait comment il n’avait pas pu remarquer quelque chose d’aussi évident. Machida avait attiré l’attention des gens sur les pertes de points potentiels en faisant oublier ce détail qui avait son importance. Yukimura était tombé dans le panneau comme tous les autres.

Ichinose — Même si on gagne tous des points, je ne peux pas laisser passer cette chance de pouvoir monter dans le classement.

Hamaguchi — Je vois qu’Ichinose-san a pris sa décision. Nous sommes avec elle.

Machida — Attends un peu. Je vois ce que tu veux dire, mais si on suit ta tactique, il n’y aura qu’un résultat possible. Et même si nous coopérons tous, toutes les classes auront le même montant de points. Tu ne pourras pas avoir le résultat souhaité. Ou bien tu essaies de trouver la cible en discutant pour nous trahir ensuite et avoir des points ? Tu as pourtant demandé à tout le monde s’ils voulaient la première issue, non ? Je ne pense pas que tu sois digne de confiance !

Ichinose — Tu as dit que l’écart entre les classes restera le même, mais c’est faux. Regarde le nombre d’élèves par classe, quatre de la classe D et C. Trois de la classe A et B. On ne recevra pas le même montant ce qui peut jouer dans le classement.

Machida — Effectivement, mais est-ce que toi et la classe B accepterez ce résultat ? Est-ce que tu es assez magnanime pour sacrifier le classement de votre classe pour aider les classes inférieures à monter en grade ? Ichinose —  Est-ce guère mieux que la classe A sorte vainqueur de cette stratégie ?  Ce serait vraiment gênant si la cible était dans votre classe.

Bien sûr, si la cible n’était pas dans la classe A, elle n’aurait pas besoin d’insister autant. Mais tant que cette possibilité était envisageable, elle insisterait sur l’importance du débat.

Hamaguchi — Je suis d’accord avec Ichinose-san, nous ne pouvons pas laisser gagner la classe A avec cette stratégie.

Hamaguchi suivit aussitôt. J’étais impressionné la première fois que j’entendis la stratégie de Katsuragi. Mais maintenant qu’Ichinose et Hamaguchi me l’avaient fait remarquer, cela avait plus l’air d’une supercherie que d’une stratégie. Quelque chose que l’on avait élaboré au moment où l’on avait cerné la nature de l’examen. Je supposais que c’était parce qu’elle connaissait les méthodes de la classe A qu’elle avait pu les contrer. Même les élèves qui étaient pour cette stratégie étaient maintenant neutres ou du côté d’Ichinose. Le champ de bataille s’était divisé en deux camps bien distincts, avec la classe A dirigé par Machida et la classe B dirigé par Ichinose. Les classes C et D étaient au milieu, comme courtisées par les deux camps. Mais cela tourna en faveur de la classe B.

Machida — Je vois que vous avez pris votre décision. Nous aussi. Quelle que soit la raison, nous ne parlerons plus. Vous être libre de discuter de ce que vous voulez entre vous.

Machida finit la discussion, puis partit avec ses camarades dans un coin de la salle. Ils allaient probablement rester comme ça jusqu’à ce que les soixante minutes s’écoulent. Et cela devait être également le cas des autres élèves de la classe A dans les autres équipes. En faisant cela, si la cible faisait partie de leur classe, elle sera très difficile à découvrir.

Ichinose — Que faire maintenant ?

Ichinose s’adressa aux trois autres classes.

Ichinose — Je n’aime pas être celle qui met à l’écart, mais si c’est le choix de votre classe, je ne peux rien y faire. Si vous voulez vous joindre à nous, faites-le-nous savoir n’importe quand.

Ichinose fit de son mieux pour motiver la classe A, mais c’était inutile. La classe A l’ignora.

Yukimura — Je me demande si c’est possible de trouver la cible sans la coopération de la classe A.

Yukimura était celui qui avait posé cette question, comme s’il se plaignait auprès d’Ichinose. Son attitude était complètement différente de lorsqu’il était sur le point de faire copain-copain avec la classe A, mais je supposais que Yukimura voulait que la classe D ne reste pas en retrait.

Ichinose — Oui, si la cible est dans la classe A ce sera difficile de la trouver. Mais les probabilités sont de notre côté avec 3 classes contre 1. Même si on ne trouve pas la personne exacte, il faudrait au moins trouver dans quelle classe elle se trouve. Ce serait déjà bien.

Ichinose n’avait pas l’air de vouloir savoir qui est la cible, elle voulait plutôt savoir si elle faisait partie de la classe A ou non.

Ichinose — On ne peut rien y faire, s’ils ne veulent pas parler. Et si la cible est dans l’une de nos trois classes, on pourra avancer. Mais si la cible est dans la classe A, on en rediscutera plus tard.

Ichinose répliqua face à la stratégie de Katsuragi en formant une alliance avec les classes restantes.

Yukimura — Je ne te fais toujours pas confiance.

C’était Yukimura qui s’était adressé à Ichinose. Manabe de la classe C était de son avis.

Yukimura — Si la cible est dans la classe A, comment peut-on l’identifier ?

Ichinose — Je ne pense pas qu’on ait besoin d’aller si loin, essayer de trouver la classe de la cible serait déjà un bon début.

Du point de vue de la cible, de voir trois classes s’allier pour la chercher est une idée terrifiante.

Ichinose — Si nous continuons de dialoguer, de meilleures idées apparaîtront. Ce que j’essaie de dire, c’est que l’examen vient de commencer. On peut prendre notre temps pour ce qui relève de trouver des idées.

Pour commencer, personne n’aurait pu contredire Machida ou Ichinose s’il n’avait rien à proposer. Comme Hamaguchi l’avait dit, cela ne serait pas juste de rejeter leurs propositions si nous-mêmes nous n’avions rien à dire. Pour l’instant, je ne devais pas me précipiter sans savoir ce que les autres allaient faire. Après tout, les personnes avec des capacités de communication assez faibles avaient tendance à suivre le courant.

Manabe — Tu t’appelles bien Karuizawa-san ? Il y a quelque chose que je voulais te demander.

Manabe interpela Karuizawa. Cette dernière qui était sur son téléphone se retourna.

Karuizawa — Oui ?

Manabe — C’est peut-être un malentendu. Mais je crois que pendant les vacances, Rika et toi vous vous êtes crêpé le chignon.

Karuizawa — Hein ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Qui est Rika ?

Manabe — C’est une fille de notre classe. Celle qui porte des lunettes. Elle a une coupe de cheveux en forme de Dango. Tu ne te souviens pas ?

Karuizawa — Je ne m’en souviens pas, tu fais erreur.

Karuizawa les envoya sur les roses puis regarda son téléphone. Mais la prochaine réplique de Manabe changea le visage de Karuizawa.

Manabe — C’est bizarre. On a entendu une autre version. Comme quoi Karuizawa de la classe D avait harcelé notre petite Rika. Elle faisait tranquillement la queue devant le café et tu l’aurais bousculée.

Karuizawa — J’sais pas d’quoi tu parles, meuf. T’as quelque chose contre moi ?

Manabe — Pas vraiment, je voulais juste avoir ta version des faits. Si c’est vrai, je veux que t’excuses auprès de Rika. Rika est le genre de personne à se laisser faire, sans riposter. C’est notre rôle de camarade de la soutenir.

Ce n’était donc pas que dans notre classe que Karuizawa avait une réputation de perturbatrice. Je détournai mon regard de ces filles. Après tout, la classe C pouvait être problématique. Karuizawa essaya de les ignorer, mais cela irrita vraiment Manabe. Manabe prit son téléphone et dirigea la caméra vers Karuizawa.

Manabe — Donc cela ne te dérange pas si je vérifie avec Rika ? Si tu n’as rien à te reprocher, ce n’est pas un problème ?

Soudain, Karuizawa se leva et prit le téléphone de Manabe. Elle employa tellement de force que le téléphone vola dans les airs avant de s’écraser.

Manabe — Qu’est-ce que tu as fait ?!

Manabe cria sur Karuizawa.

Karuizawa —  C’est ma réplique, ne me prend pas en photo sans ma permission. Je t’ai déjà dit que je n’avais rien fait !

Les deux côtés accusaient l’autre et la tension montait à vue d’œil. Ichinose les observa pour essayer de discerner le vrai du faux.

Manabe — Qu’est-ce que tu feras si mon téléphone est cassé ?

Karuizawa — Tu n’as qu’à tout simplement demander au lycée de t’en procurer un nouveau !

Manabe — Il y avait des photos qui me tenaient à cœur dedans.

Manabe ramassa son téléphone en regardant Karuizawa avec un regard noir. Deux autres élèves de classe C se mirent devant l’accusée pour l’intimider.

Karuizawa — C’est de ma faute, là !?

Manabe — Si tu es vraiment innocente, pourquoi t’es sur la défensive ? Laisse-moi te prendre en photo.

Karuizawa — Je veux pas, c’est tout.

Je m’attendais à ce que Karuizawa réponde plus agressivement, mais elle avait l’air faible. Ou plutôt, même si elle essayait de parler durement, je pouvais sentir de la peur dans sa voix. Peut-être que c’était juste mon imagination.

Manabe — Tu veux pas assumer, c’est ça ?

Manabe dirigea son téléphone vers Karuizawa pour la prendre en photo de force. Les filles de la classe C regardaient la scène en riant. Seule Ibuki avait une attitude différente et ne s’était pas jointe à elles. Elle regarda simplement Manabe avec dégoût, mais cela ne l’arrêta pas.

Ibuki — C’est idiot…

Manabe — Idiot ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Tu n’as rien avoir là-dedans, tu n’es même pas l’amie de Rika.

Ibuki — Tu as raison, je n’ai rien à voir dans cette histoire. Je ne fais qu’observer.

Ibuki le dit les bras croisés en regardant autre part. Manabe n’avait pas l’air d’avoir apprécié l’attitude d’Ibuki. Mais plutôt que de lui répondre, elle leva la voix contre Karuizawa. C’était peut-être parce qu’il y avait une hiérarchie dans la classe C et qu’Ibuki était au-dessus de Manabe.

Manabe —  Dans tous les cas, je prendrai cette photo.

Karuizawa —  S’il vous plaît, faites quelque chose pour l’arrêter !

Machida — Manabe, si Karuizawa refuse, tu dois arrêter.

Manabe —  T-tu n’as rien avoir là-dedans.

Machida —  Peu importe, tu es en tort. Si Karuizawa refuse de se faire prendre en photo. Tu n’as pas le droit de le faire contre sa volonté. Ce serait mieux si tu demandais à ton amie de confirmer.

Bien sûr, Machida avait raison. Prendre en photo quelqu’un contre son gré était une violation de la vie privée. Manabe était obligée de l’admettre et elle rangea son téléphone.

Karuizawa — Arrête avec tes fausses accusations, vraiment. Et merci, Machida-kun.

Karuizawa regarda Machida avec respect et le remercia. Même s’il faisait partie de la classe A, il avait un cœur. Takemoto et les autres ne semblaient pas intéressés.

Machida — Je n’ai fait que mon devoir…

Machida rétorqua cela en rougissant légèrement.

Peut-être que c’était le début d’une histoire d’amour entre Machida et Karuizawa? Mais Karuizawa sortait déjà avec Hirata. Il y avait donc un petit problème. Mais plus urgent que cela, le conflit entre Karuizawa et la classe C n’était pas terminé.

2

Le conflit ne s’était pas arrangé. Une heure s’écoula, puis une annonce du lycée autorisa les élèves à quitter leur salle. La classe A fut la première à s’éclipser.

— Vous êtes libre de faire ce que vous voulez !

Ils quittèrent la salle en claquant la porte derrière eux, laissant ainsi la pièce en proie au silence. Même si Ichinose avait rejeté la stratégie de Katsuragi à la fin, personne n’avait parlé. Je me demande si elle avait encore des cartes à jouer ou si elle était sincère concernant son envie de discuter.

Ichinose — Il nous reste encore cinq réunions alors terminons cette séance.

Ichinose parla avec une voix rafraîchissante.

Effectivement, si on restait plus longtemps, cela empiéterait sur notre temps personnel. Après avoir traité autant d’information, nos classes respectives étaient épuisées. Ce n’était pas une mauvaise idée de séparer l’équipe pour l’instant.

Karuizawa —  Je m’en vais.

Karuizawa se leva aussitôt pour partir, mais ses jambes étaient engourdies. Dans sa précipitation, elle écrasa par accident le pied de Manabe.

Manabe — Aïe !

Manabe cria de douleur.

Karuizawa — Je suis désolée, je ne voulais pas t’écraser !

Elle s’excusa rapidement avant de quitter la salle en coup de vent.

Manabe — Qu’est-ce que c’est ça ?!

Manabe nous cria dessus. Elle avait l’air énervée à cause de la douleur et de l’attitude de Karuizawa et cela se répercuta sur nous. Je détournai le regard pour éviter qu’elle ne me remarque et pris la fuite discrètement.

Yukimura — Allons-y aussi, j’aimerais savoir ce qu’il s’est passé du côté d’Hirata.

Comme toutes les classes élaboraient une stratégie, Yukimura aussi voulait comploter quelque chose. Sotomura se leva aux paroles de Yukimura. À la fin, il n’y avait que les élèves de la classe B et Ibuki qui étaient dans la salle.

Sotomura — J’ai encore faim, tu crois qu’il reste toujours le buffet du déjeuner ?

Ce n’était pas normal. Quel genre de corps pouvait digérer toute cette nourriture en une heure seulement ? Il comptait devenir obèse ? De toute manière, je n’étais pas sûr que cela lui traversait l’esprit.

Moi — Yukimura, tu ne trouves pas que Karuizawa est bizarre aujourd’hui ?

J’avais posé cette question à Yukimura après que nous ayons quitté la salle. Mais Yukimura me regarda bizarrement.

Yukimura —  Elle est tout le temps bizarre.

Une réponse directe et franche, mais ce n’était pas ce que je voulais entendre. Ce n’était que mon intuition, mais il y avait quelque chose qui clochait à propos de son attitude. Sotomura n’avait rien remarqué non plus. Je rallumais mon téléphone que j’avais éteins en rentrant dans la salle, et je vis que Sakura m’avait envoyé un message. Elle voulait me voir et me demanda si j’avais un moment. Bon timing. Je pensais questionner Hirata et Horikita à propos de leurs séances, mais obtenir des informations de la part de Sakura n’était pas mal non plus.

Je lui demandai l’endroit où l’on pourrait se voir. L’endroit d’hier venait de me traverser l’esprit, mais j’avais déjà envoyé le message. Sa réponse fut quasiinstantanée. Ce serait sûrement bondé, mais on se fondrait dans le décor. Comme la première séance de discussion venait de se terminer, il y avait beaucoup d’élèves qui attendaient devant l’ascenseur. Il ne pouvait prendre que dix personnes à la fois, il était donc plus pratique de prendre les escaliers. Je me dirigeai vers ces derniers lorsque je reçus un message. Il y avait visiblement trop de monde pour elle, alors elle décida de monter sur la plate-forme. Il semblerait que Sakura avait encore du mal avec la foule. Je changeai de direction et je me dirigeai vers l’avant du bateau. Il y avait tout ce qu’il fallait dedans. C’était le luxe par excellence, avec la vue sur la mer depuis la plate-forme comme cerise sur le gâteau. À ce moment, il n’y avait que peu d’élèves. En fait, il n’y avait personne ici, comme si toute cette zone m’appartenait. Même avec l’entièreté de la plateforme pour nous, Sakura se cacha dans un coin derrière un pilier. Cela aurait été malpoli de crier son nom, donc je me rapprochai d’elle.

Sakura — Je voudrais savoir…

C’était une toute petite voix, mais je ne pouvais pas bien entendre.

Sakura — Est-ce…est-ce que… tu-tu voudrais sor sor-sortir av-avec mmm…

Sakura parla dans sa barbe et de l’extérieur, c’était tout bonnement déroutant de l’entendre sans la comprendre.

Moi —  Qu’est-ce qu’il y a ?

Je fis attention à lui parler posément pour ne pas la surprendre.

Sakura —  OOOOOOOOOOOOIIII !

Sakura sursauta en criant ce qui me surpris !

Sakura —  D-d-depuis q-q-quand t-t-tu es là ?

Moi — Je viens d’arriver.

Elle ressemblait à un petit animal qui se méfiait de son environnement. Mais je me demandais si elle parlait à des amies imaginaires ou bien à un fantôme ?

Sakura — Est-ce que tu as entendu ? As-tu entendu ce que je viens de dire?

Moi — Des bribes de mots oui. Mais je n’ai rien compris.

Sakura avait l’air rassurée à l’idée que je n’avais rien entendu.

Moi — Pourquoi voulais-tu me voir ?

Sakura — Euuh… eh bien… oui… . L’examen me rend un peu nerveuse.

[1] Le flag dans la culture otaku désigne une situation ou un évènement cliché.

 

Elle me tendit un papier, je pouvais voir une liste de noms.

Classe A : Sawada Yasumi, Shimizu Naoki, Nishi Haruka, Yoshida Kenta

Classe B : Kobayashi Yume, Ninomiya Yui, Watanabe Kihito

Classe C : Yuuki Yuuya, Nomura Yuuji, Yajima Mariko

Classe D : Ike Kanji, Sakura Airi, Sudou Ken, Matsushita Chiaki

Sakura faisait partie de l’équipe Boeuf. Il semblerait que l’atmosphère était aussi tendue que dans notre groupe. Les garçons dans ce groupe, à savoir Ike et Sudou, ignoraient Sakura, alors que dans cet examen on était obligé de passer du temps avec ses camarades de classe, quelles que soient les circonstances. Si j’étais dans son groupe, j’aurais pu lui donner un coup de pouce, mais là, je ne pouvais pas faire grand-chose. Une fois qu’il était temps de se battre, il n’y avait plus lieu d’hésiter. J’aurais pu l’aider secrètement en la contactant au milieu de l’examen. Mais en faisant cela, j’attirerais l’attention sur moi. Et dans ces circonstances, ce genre d’action pouvait signer mon arrêt de mort.

Moi — Ce serait bien si tu connaissais quelqu’un d’une autre classe, mais ils te sont tous étrangers.

J’y avais déjà pensé, mais si je voulais l’aider, Ichinose et Kanzaki étaient les seuls sur qui je pouvais compter. Cependant, comme Ichinose était dans mon équipe, c’était un peu compliqué et je ne pouvais pas confier Sakura à Ike ou Sudou.

Moi — Désolé, je n’ai pas d’amis.

Sakura — Ne t’excuse pas, moi non plus je n’ai pas d’amis.

C’était déprimant, on aurait dit un concours de celui qui paraissait le plus pathétique. Au lieu de me vanter de ma solitude, je changeai de sujet.

Moi — Je voudrais te demander quelque chose.

Sakura — Hein ? à Moi ?

Moi — Je voulais savoir si Yamauchi t’avait contactée depuis ?

Sakura — Non, il ne m’a pas contacté.

Moi — Je vois…

Sur l’île, pour me servir de Horikita, j’ai dû utiliser Sakura d’abord. Pour appâter Yamauchi, je lui avais promis de lui donner le numéro de Sakura en échange de sa coopération. Bien sûr, je n’avais pas l’intention de lui donner son numéro sans l’accord de Sakura, mais je ne lui avais pas encore dit. Je craignais qu’il l’approche, mais je m’étais visiblement inquiété pour rien.

Moi — Si tu as besoin de moi, n’hésite pas à m’envoyer un message, d’accord ?

Sakura — Oui, c’est le moins que je puisse faire.

Alors que j’avais dit des généralités, les yeux de Sakura s’illuminèrent comme ceux d’un petit enfant. Peut-être qu’elle était juste contente de me parler.

Sakura —  Je t’appellerai !

Moi —  D’accord.

Elle était différente de la Sakura de d’habitude, elle avait l’air pleine de vie et de vigueur. J’imagine qu’elle devait apprendre à avoir plus d’entrain jour après jour. Bien que quelques jours s’étaient écoulés depuis la fin de l’examen sur l’île, Sakura avait pas mal gagné en maturité. Comme c’était une épreuve assez rude, cela avait dû vraisemblablement avoir un impact sur une jeune fille en pleine croissance comme elle. Elle n’avait pas complètement changé non plus, mais dans une situation difficile, elle savait rester positive dorénavant.

3

Yamauchi —  Aaaaaaayyyyyyaaaaannnnoooooooookkkkkôôôoôôjjiiiii !

Lorsque je revins dans l’intérieur du bateau, une personne surgit de l’ombre. Il se dirigea précipitamment vers moi. En me retournant, je pouvais voir mon camarade Yamauchi Haruki qui avait pris la forme d’un Asura.

Moi — Qu’est-ce qu’il y a ?

Bien sûr, je savais déjà ce qu’il allait me dire. C’était juste par politesse.

Yamauchi — Comment t’as pu oublier ? Tu m’as promis de me donner le numéro de Sakura, tu te souviens ?

Il fallait vite que je trouve une excuse.

Yamauchi — Je ne te cherchais pas vraiment, mais je voulais juste te le rappeler.

Moi — Tu crois vraiment qu’un loup solitaire comme moi aurait le numéro de Sakura ?

J’avais fait de mon mieux pour que ce que je disais paraisse sincère. Yamauchi — Est-ce que ? Est-ce que tu essayais d’avoir le numéro de Sakura, là maintenant ?

Lorsque j’hochai la tête, son visage se décomposa, il était choqué. Il posa un genou à terre.

Yamauchi — Ça veut dire… ça veut dire que même en ignorant son numéro, tu m’as utilisé ?

Moi — Oui, tu as raison.

Yamauchi — Sakura t’as donné son numéro ?

Moi — Je suis désolé…

Yamauchi — Comment ça t’es désolé ? Je ne te demande pas de t’excuser. Je veux juste son numéro.

Cette réponse si froide démontrait bien sa déception.

Yamauchi — Comme oses-tu… comment oses-tu me faire ça ?!

Je sais que ce que j’avais fait était mal, mais je n’allais pas lui donner le numéro de Sakura sans son accord. Même s’il lui demandait en personne, elle refuserait sûrement.

Moi — Peux-tu me donner un peu plus de temps ?

Yamauchi — Du temps ? Menteur d’abord, voleur ensuite comme on dit !

De tous les élèves de la classe D, je n’aurais jamais pensé que Yamauchi soit le premier à me qualifier de menteur.

Moi — Tu vas demander à Sakura ?

Yamauchi — Oui, je vais le faire.

Il était aveuglé par la colère et n’avait pas les idées en place. Il voulait le numéro de Sakura à tout prix et j’avais l’impression qu’il utiliserait même la force.

Moi — Sakura déteste les garçons qui n’ont pas de parole.

Yamauchi — Tu n’as pas tenu ta parole pourtant.

Moi — Oui. Je ne peux rien y faire si tu es énervé contre moi, mais c’est évident que je ne te donnerai pas son numéro comme ça. Essayer de la forcer serait inutile.

Yamauchi — C’est juste une excuse. De toute façon tu n’as jamais eu son numéro n’est-ce pas ?

Moi — Tu sais que Sakura aime les photos ? Et son appareil actuel est assez vieux. De plus, elle n’a pas assez de points pour s’en acheter un nouveau. Je suis sûr que si tu lui en achetais un, cela lui ferait plaisir.

Yamauchi — Ce serait une bonne id… Non, je n’ai pas assez de points non plus.

Moi — N’oublie pas que durant cet examen, en protégeant la cible, en sabotant ton équipe ou bien en la menant à la victoire, tu peux gagner assez de points pour lui en acheter un nouveau.

Yamauchi — Donc si je me démène, j’ai des chances de me rapprocher de Sakura ?

J’avais fait en sorte que Yamauchi arrive à cette seule conclusion.

Moi — Actuellement, tu dois développer ta masculinité. C’est le seul moyen de se rapprocher d’une ex-idole comme Sakura.

Je l’encourageai. Il était possible qu’en le motivant comme ça, il puisse repousser ses limites lors de l’examen en faisant de meilleurs résultats.

Yamauchi — Je vais le faire ! Je vais le faire ! Je vais le faire et Sakura sera à moi !

Moi — Oui, si c’est toi Yamauchi je suis sûr que tu peux y arriver.

Yamauchi — Ooooooohhhhhhh ! Je viendrai à bout de cet examen haut la main !

J’avais réussi à rediriger en quelque sorte la colère de Yamauchi vers l’examen.

Mais peut-être que sa colère ressurgirait vers moi lorsque l’examen serait fini. Le souci était réglé pour l’instant. Néanmoins, un autre problème qui pourrait se présenter serait qu’il soit trop euphorique et qu’il fasse un faux pas en cherchant la cible.

Moi — Je te dis ça au cas où mais…

Yamauchi — Oui ?

Moi — Rien d’important. Mais si tu trouves la cible dans ton équipe, ne laisse pas les autres classes te coiffer au poteau.

Yamauchi — Ne t’inquiète pas.

Mais maintenant que j’y pensais, ce serait tout de même mieux que Yamauchi ne trouve pas la cible si on partait sur une perspective de bénéfices à long terme.

4

Comme seule la classe A était assurée d’avoir un bel avenir après la remise des diplômes, il était compliqué pour les autres classes de coopérer avec elle. Les classes B et D voulaient respectivement prendre la place des classes A et C.

D’autre part, ces deux classes pouvaient aussi s’allier pour vaincre les classes B et D. En gardant cela à l’esprit, que se passerait-il si on tentait de les inciter à former une alliance ? Leur alliance serait certainement une menace réelle. Mais avec de la chance, même si ce n’était pas gagné, il était possible que des classes rivales puissent coopérer si des personnes compétentes étaient sur le devant de la scène comme Ichinose qui était dotée un grand charisme.

Mais pour le moment, le groupe de la classe A ne participait à aucune discussion. Comme il restait muet, il était impossible pour les groupes des autres classes d’avoir une discussion décente et le temps s’écoulait lentement. Je commençais à observer les réactions des autres élèves. Ce n’était pas comme si tout le monde ici avait de mauvaises intentions, mais la plupart des gens préférait rester avec leurs camarades de classe.

Ichinose — C’est la deuxième fois que nous nous rassemblons. Je pense qu’on devrait commencer à s’investir dans l’examen comme nos séances sont limitées.

Ichinose comme la dernière fois prit l’initiative. Hamaguchi et les autres de la classe B étaient dans ce même état d’esprit de coopération. Elle ressemblait beaucoup à Hirata mais contrairement à lui, Ichinose et son groupe avaient en tête une victoire totale. Comme tout le monde était sur ses gardes, la tension était à son comble hormis pour les trois élèves de la classe A qui ne quittaient pas leur téléphone en ignorant complètement la situation. De toute manière, il n’y avait aucune règle qui interdisait de contacter les autres équipes.

Les riches étaient riches et les pauvres étaient pauvres. La classe A pouvait se reposer sur ses lauriers étant donné qu’elle était en haut de la hiérarchie. J’ai

cru que sa défaite lors de l’examen précédent l’aurait chamboulée mais on dirait que Katsuragi avait réussi à faire émaner d’elle une certaine aura de sérénité. Il se dégageait d’elle une sorte de force tranquille. En y repensant, c’était effectivement une bonne stratégie de sa part de montrer que sa classe gardait son sang-froid. Pour un loup solitaire comme moi, il allait être difficile de l’ébranler.

Yukimura —  Je ne pense pas qu’on ait besoin de briser la glace avec eux. Mais je suis d’accord sur le fait que l’on doive discuter pour essayer d’identifier la cible, classe A ou pas.

Yukimura était d’accord avec Ichinose. En effet, si la cible était dans une autre classe, c’était une opportunité qu’on ne pouvait pas gâcher. Ou peut-être que s’il agissait comme cela, c’était pour cacher le fait qu’il était la cible.

Karuizawa —  Vous pensez vraiment que l’on peut trouver la cible en discutant ? Je n’en suis pas sûre ! L’examen est vraiment difficile !

Ichinose —  Je te comprends, Karuizawa-san. Mais ce n’est qu’une question de point de vue. Tout comme l’examen sur l’île, ce genre de test est censé surprendre les élèves Karuizawa — Surprendre ?

Sotomura — S’il faut suspendre quelque chose alors laissez-moi faire, c’est ma spécialité ! Mo-e-a-g-a-r-e !!!

Sotomura cria soudainement quelque chose d’incompréhensible. Et puis il avait confondu surprendre et suspendre.

Ichinose —  Ce test sur le bateau est plutôt confortable, non ? Tu peux parler, jouer à ton portable et faire plein d’autres choses. Même si y a ces réunions de discussion obligatoire, tu es quand même libre de tes mouvements.

Karuizawa —  Oui, c’est plutôt cool.

Ichinose —  C’est la raison pour laquelle nous devrions être plus décontractés et se parler comme des amis. Cela ne sert à rien de rester dans son coin comme Machida-kun et de s’exclure de tout.

Ichinose tenta de convaincre Karuizawa.

C’est vrai qu’en considérant cet examen comme des vacances, ça faciliterait les discussions de groupe. Ce n’était qu’une question de point de vue comme l’avait dit Ichinose, mais plus on sera positif et plus ce sera facile de terminer l’examen. Mais après avoir entendu Ichinose, Machida se mit à rire.

Machida — Vous pouvez faire ce que vous voulez, mais c’est très peu probable que vous trouviez la cible de cette façon. Je ne sais pas où est la cible, mais si elle ne coopère pas avec ses camarades, elle va faire tout ce qui est en son pouvoir pour se cacher et gagner des points. Et peut-être que la cible fait partie de la classe B. Ce n’est pas impossible. Pouvezvous vraiment leur faire confiance ?

Machida parla assez fort pour essayer de faire douter les élèves des classes C et D.

Ichinose — Cela vaut pour toi aussi.

Machida —  Évidemment…

Pendant un court instant, Machida quitta Ichinose du regard. Pour être plus précis, ses yeux se dirigèrent vers un élève de la A, Morishige, assis près de lui. Mais il reprit son regard habituel aussitôt replongeant la classe A dans son calme imperturbable.

Machida —  Nous ne sommes pas particulièrement intéressés par la cible, après tout, nous avons 100 000 points mensuellement. Personne dans la classe ne serait émerveillé par 500 000 points.

Ichinose —  Vraiment ? Tu peux te contenter de ce que tu as ? Ce n’est pas comme s’il y avait une limite de point à ne pas dépasser tu sais. Machida — Arrête de faire l’idiote s’il te plaît et oublie-nous.

Ichinose gardait toujours son sourire malgré la combativité de son adversaire.

Même Machida qui avait dit qu’il ne participerait pas aux discussions venait de tomber dans le piège d’Ichinose en répondant. Peu importe ce qu’il disait, il donnait forcément des informations. En utilisant Karuizawa et Yukimura pour le

provoquer, Ichinose avait réussi à récolter des informations sur la classe A et je me demandais si Machida s’en était rendu compte.

Pendant ce temps, Karuizawa soupirait pendant qu’elle était sur son téléphone. Il n’y avait rien qui nous empêchait d’utiliser notre portable pendant cet examen, mais ce n’était pas la meilleure des idées de l’utiliser lorsque le but de cette épreuve était de trouver la cible. Ou bien Karuizawa jouait à l’espionne et envoyait des informations à Hirata depuis son téléphone. Si c’était le cas, elle avait mon respect, mais j’en doutais. Karuizawa n’y mettait jamais du sien dans tout ce qu’elle entreprenait donc son comportement était normal. Mais depuis le début de l’examen, j’avais remarqué qu’elle n’agissait pas comme d’habitude. Dans la classe, on pouvait lui reprocher ce qu’on voulait mais elle et Hirata avaient le don de rassembler. Dans la logique, elle aurait dû faire la même chose ici chez les Lapins. Hirata et Kushida étaient restés tels qu’ils étaient malgré le changement d’environnement mais Karuizawa avait changé. Se sentait-elle inférieure à Manabe qui faisait partie de la classe supérieure ? Pourtant, la classe D avait plus que jamais besoin d’union plus que de penser à gravir les échelons. Karuizawa était indispensable pour obtenir cette cohésion car elle avait une influence sur les filles de la classe D.  C’est ce que je pensais en tout cas, d’où mon inquiétude pour elle. Je devais déterminer si elle me serait utile ou non à l’avenir et je ne pouvais pas me permettre de perdre de temps au vu de la brièveté de l’examen. Selon les circonstances, j’allais peut-être même être obligé d’utiliser la force avec elle. Une fois que les soixante minutes s’écoulèrent, les élèves de la classe A quittèrent la salle. Ils avaient l’intention de garder leur stratégie jusqu’à la fin.

— Je suppose que cet examen est une autre paire de manches. Qu’est-ce que t’en penses, Ayanokôji-kun ?

Celle qui m’interpella était Ichinose Honami, le leader de la classe B. Elle était intelligente et tout le temps calme. Elle avait sûrement remarqué que je n’avais pas encore donné mon avis. Si j’avais été dans sa classe, je serais certainement tombé amoureux d’elle. Elle était vraiment charmante et populaire auprès des garçons de toutes les classes confondues. Elle faisait jeu égal avec Kushida.

Moi — Honnêtement, je suis le genre de personne qui s’assoit et qui regarde les nuages dans des examens de ce genre.

Ichinose — Il est trop tôt pour abandonner. Travaillons ensemble pour terminer cet examen dans les meilleures conditions.

Ichinose m’encouragea. Il semblerait qu’elle était déterminée à travailler dur. Ichinose — Même si nous continuons de parler, je doute que la cible révèle son identité. Elle a tout à gagner à cacher son identité et tout à perdre en la révélant. Si quelque chose tourne mal, le pire scénario énoncé par la classe A se réaliserait.

Malgré ce qu’elle avait dit, les yeux d’Ichinose restaient confiants. Je ne savais pas comment elle pouvait rester si sereine face à l’adversité.

Ichinose — C’est la fin de la réunion. Merci à vous deux !

Moi —  On n’a pas fait grand-chose, pas la peine de nous remercier !

Ichinose se redirigea vers ses camarades. Je l’avais observée aujourd’hui, mais je n’arrivais pas à déceler ses véritables intentions. Mais au moins, notre groupe ne pataugeait pas dans la semoule. Elle élaborait peut-être une stratégie qui devait rester secrète. Lorsque Manabe et son groupe se levèrent et quittèrent la salle, je partis à leur poursuite. Une fois arrivé devant l’ascenseur, j’interpellai Manabe.

Moi — As-tu deux secondes à m’accorder ?

Une fois qu’elle me vit, elle se mit sur ses gardes, surprise par mon appel.

Moi — J’ai entendu ta dispute avec Karuizawa. Quelque chose à propos d’une bousculade devant un café, c’est ça ?

Manabe — Oui et quel est le problème ?

En temps normal, elle m’aurait dénigré, mais après avoir remis ce sujet sur le tapis, j’avais pu avoir son attention.

Moi — Je ne suis pas sûr à 100 %, mais je crois avoir vu effectivement Karuizawa bousculer ton amie devant ce café Manabe.

Manabe —Vraiment ?

Moi — Oui. Je n’ai pas aimé sa façon de faire, c’est pour ça que je suis venu te le dire en face à face.

J’avais déterré la hache de guerre qu’il y avait entre Karuizawa et les filles de la classe C. Pour être sincère, je n’avais rien vu du tout. J’avais menti volontairement pour que l’embrouille continue. Maintenant, Manabe et ses amies allaient vouloir se venger. J’étais pressé de voir comment Karuizawa allait réagir.

5

Je retournai dans ma chambre assez tardivement et m’enfonçai dans le lit sans dire un mot. Un peu avant minuit, au moment où j’allais fermer les yeux, j’entendis un bruit. C’était Hirata qui me fixait. Yukimura quant à lui, était assis sur le canapé.

Hirata — Bien joué, Ayanokôji-kun. Tu n’es pas rentré tôt cette fois !

Moi — D’ailleurs, je voulais te demander quelque chose Hirata.

Hirata — Tu es sûrement fatigué, mais je voulais te demander quelque chose.

Hirata m’avait dit la même chose en simultané.

Hirata — Tu voulais aussi me demander quelque chose ?

Moi — Je t’écoute d’abord, ma question est assez banale.

Hirata avait l’air de vouloir parler de l’examen. Si je refusais, l’atmosphère aurait été bizarre. Je mis mon survêtement et Hirata me fit une petite place en se décalant vers la gauche pour que je puisse m’asseoir. Je voulais demander à Hirata s’il avait eu des informations à propos de Sakayanagi, mais cela ne me posait aucun problème de l’écouter en premier.

Hirata — Yukimura-kun m’avait demandé des choses sur mon équipe alors j’ai voulu attendre que vous soyez tous réunis.

Je présumais que Kôenji, ici présent, n’était pas intéressé par notre conversation.

Kôenji — Désolé mon petit Hirata. Je perfectionne ma beauté.

Koênji nous dit cela torse nu en faisant des pompes. Il transpirait en grande pompe et cela n’avait pas l’air de le déranger.

Son attitude n’était pas ce qu’un lycéen lambda pouvait se permettre d’adopter. Est-ce qu’il s’impliquait vraiment dans cet examen ? Hirata répondit à ma question comme s’il avait lu mes pensées.

Hirata —  Koênji-kun se rend aux discussions de groupe pour ne pas être pénalisé mais c’est tout. D’ailleurs, mes amis m’ont dit que deux de nos camarades étaient des cibles.

Yukimura —  Ça veut dire que…

Hirata — Je ne peux pas te révéler leurs noms, car ils me font confiance. Yukimura —  Est-ce que tu insinues que tu ne nous fais pas confiance ? Nous avons aussi le droit de savoir qui sont les cibles, cela pourrait nous donner des indices pour finir l’examen. C’est normal entre camarades de s’entraider et de partager des informations, non ?

Hirata —  Oui… C’est la raison pour laquelle je vous ai rassemblé… Il connaissait donc déjà certaines cibles.

Moi —  Ce serait mieux que tu nous le dises en utilisant ton téléphone. Les murs ont des oreilles.

Hirata —  Tu as raison. Un instant s’il te plaît.

Hirata nous montra son téléphone et nous pouvions voir les noms de Kushida qui faisait partie de l’équipe Dragon et de Minami qui faisait partie de l’équipe Cheval. Ces deux filles étaient des cibles.

Yukimura —  Je vois !

Yukimura n’en dit pas plus. Comme Kushida était la cible, nous pourrions avoir l’avantage chez les Dragons. Mais la cible faisait partie de notre classe, ce qui était aussi un risque supplémentaire.

Hirata —  Ne t’inquiète pas, tout se passera comme sur des roulettes. Hirata essaya de me rassurer avec un visage confiant. Ce visage semblait dire que, quelles que soient les circonstances, ils allaient y arriver.

Yukimura —  Chaque classe de chaque équipe doit avoir une probabilité égale d’abriter la cible en son sein. Il nous resterait donc à identifier une autre cible de notre classe dans une autre équipe.

Hirata —  Oui, Yukimura-kun n’a pas tort. Peut-être que cette cible s’est d’ailleurs manifestée à quelqu’un d’autre chez nous.

Mais consulter quelqu’un augmente les chances de se faire démasquer. Pendant que nous avions une discussion sérieuse, Kôenji commença à chanter dans la chambre. Après avoir gardé patience tout le long, ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase pour Yukimura.

Yukimura —  Kôenji, tu peux arrêter de chanter cette satanée chanson ? Et puis reste concentré, tu veux ? Ne te tire pas de l’examen comme sur l’île.

Yukimura réprimanda Kôenji assez sèchement.

Kôenji —  Qu’est-ce que je pouvais y faire, je n’étais pas en forme. Ne me demande pas l’impossible.

Yukimura — C’est ça, on va te croire.

Kôenji — Mais l’examen dure encore deux jours, c’est tout de même bien ennuyeux.

Kôenji continuait ses pompes puis il se leva et mit sa serviette sur le lit.

Yukimura —  Ennuyeux ? Tu ne penses même pas à l’examen sérieusement.

Kôenji —  Cela ne sert à rien de continuer cet examen inutile, ce n’est qu’un vulgaire quizz pour démasquer un menteur.

Kôenji prit son téléphone et tapota dessus pendant un moment. Peu après, nos téléphones sonnèrent en même temps.

Yukimura —  Qu’est-ce que t’as fait Kôenji ?!

Hirata et moi lûmes le message.

— L’examen se termine pour l’équipe Singe. Les élèves faisant partie de ce groupe n’ont plus besoin de participer. Veuillez ne pas déranger les autres élèves encore en course.

Yukimura —  C’est ton groupe Kôenji !

Kôenji —  Oui et maintenant j’ai retrouvé ma liberté. Ciao.

Kôenji jeta son téléphone puis disparut en rentrant dans la salle de bain, nous laissant bouche bée.

Yukimura — Bordel ! On fait de notre mieux et cet énergumène, voilà ce qu’il fait !

Hirata — Il se peut qu’il ait trouvé l’identité de la cible.

Yukimura —  Non c’est impossible, il a fait ça juste pour se débarrasser de l’examen.

Je ne pense pas que Kôenji avait pris cet examen au sérieux. Cependant, il avait un très grand sens de l’observation et percevait bien les choses. Si ce qu’il a dit à propos de l’examen se révélait être vrai en précisant le fait qu’il fallait « trouver le menteur », il se pourrait qu’il ait réussi un coup de maître. Ce qu’avait fait Kôenji commença à circuler et le téléphone d’Hirata n’arrêta pas de sonner à cause des messages. Les conversations étaient noyées par des élèves surpris par cette fin précoce. J’étais sûr que Katsuragi, Ryuuen et Ichinose n’en croyaient pas leurs yeux. Personne n’aurait imaginé qu’un traître apparaisse dès le premier jour. Horikita m’avait même envoyé un message : Désolée. Vu les circonstances, il faut que je t’appelle.

Yukimura —  Bordel ! Grâce à Kôenji, tout est parti en sucette ! Je vais aller prendre l’air !

On dirait bien Yukimura ne dormira pas sur ses deux oreilles après s’être énervé autant contre lui. Lorsque la tension retomba, je quittai la chambre. Bien que Kôenji arrêta prématurément l’examen d’une équipe, je n’allais pas ruminer sur ça éternellement. Pour être honnête, je n’aurais rien pu faire vu que ma marge de manœuvre était limitée. Même si je m’étais creusé la tête, cela aurait été difficile voire impossible de mener les autres groupes de la classe D à la victoire.

Si on travaillait main dans la main, on aurait eu une chance mais ce n’était malheureusement pas le cas. Il y avait plusieurs méthodes pour soutenir mes camarades des autres équipes, mais le temps nous était compté et les enjeux étaient considérables. Si j’avais des informations cruciales qui pouvaient retourner la situation, j’aurais pu tenter des choses mais je n’avais d’autre choix que de compter sur Hirata et Kushida pour gérer notre classe.

Il restait seulement trois jours en comptant les vacances. Ce qui était impossible était impossible, il ne fallait pas forcer.

Même si j’avais réussi à obtenir leur coopération, Je n’aurais pas eu assez d’alliés de mon côté. Je ne savais pas ce qu’il se disait dans les discussions des autres équipes, mais je faisais confiance à Horikita et Sakura. Mais cela ne résolvait pas le fait que j’avais besoin de plus d’yeux et d’oreilles de mon côté.

6

Je me promenai sur la plate-forme du bateau et on pouvait voir un beau ciel étoilé. C’était magnifique. Un spectacle que les citadins ne pouvaient pas apprécier. Les photos dans les livres n’étaient rien à côté. Il y avait quelques élèves qui regardaient le ciel main dans la main ce qui fit me sentir un peu seul. Comme il se faisait tard je ne pouvais voir leur visage. De toute façon, je me fichais bien de ce genre de sorties romantiques.

Parmi ces élèves, il y avait la silhouette d’une fille qui se tenait dans l’ombre. Même si j’engageai la conversation avec elle, je ne pouvais pas lui proposer de regarder les étoiles ensemble. Et puis on ne sait jamais si son copain arrivait après. J’étais tout de même curieux de connaître l’identité de cette fille et me rapprochais peu à peu. Elle me remarqua et tourna la tête.

—  A…a… Ayanokôji-kun ?

Moi — Cette voix, c’est toi Kushida ?

Elle sortit de l’ombre avec un visage surpris.

Moi — Tu es seule ?

Peut-être que Kushida avait rendez-vous avec son petit ami. Penser à ça m’avait fait un petit pincement au cœur pour être honnête.

Kushida —  Oui, je n’arrive pas à dormir.

Moi — Je vois…

Elle n’était pas ici pour admirer les étoiles avec son copain. Il semblerait qu’elle venait de sortir de la douche. Une odeur enivrante imprégnait son survêtement. C’était la même odeur de shampoing que l’on avait dans les chambres.

Moi — Tu n’as pas froid ?

Kushida —  Ça va aller, et toi Ayanokôji-kun, tu es seul ?

Lorsque j’hochai la tête, Kushida rit aux éclats.

Kushida —  Donc on est tous les deux seuls ? Je suis contente.

Moi —  …….

J’aurais pu faire un sous-entendu romantique, mais je préférai me taire. En revanche, mon rythme cardiaque augmentait parce que j’étais seul avec Kushida dans un endroit réservé aux couples. Mais bon, connaissant sa véritable nature, elle devait avoir cette situation en horreur.

Moi —  Je pense que je vais y aller.

Kushida —  Déjà ?

Moi —  Je commence à voir sommeil.

Kushida —  À demain alors.

Après avoir échangé des formalités, je me retournai pour quitter cet endroit, mais…

Kushida — Attends !

Kushida cria et s’agrippa à moi. Je pouvais sentir sa chaleur même à travers la froideur de son survêtement.

Moi — K-K-K-Kushida ? Qu’est-ce que tu fais ?

Évidemment, dans cette situation inattendue, je paniquai. C’était au-delà de ce que je pouvais endurer. Mais Kushida ne me répondit pas directement.

Kushida — Désolée, je me suis soudainement sentie seule.

Elle m’avait répondu avec une petite voix et me murmura cela pendant qu’elle était serrée contre moi. Ces mots eurent le même effet qu’un direct de Mike Tyson et mon cerveau cessa de fonctionner pendant un petit moment. Elle resta collée à moi pendant quelques secondes puis tout à coup, comme si le sort avait été levé, reprit ses distances.

Kushida — …Dé-désolée, bonne nuit, Ayanokôji-kun.

 

 

Je ne voyais pas clairement le visage de Kushida, mais elle rougissait. Sans un mot, elle prit la fuite. Maintenant, trouver le sommeil allait être difficile. Je ne pouvais pas retourner dans ma chambre comme ça. Je décidai de me balader dans le bateau. Ça m’avait vraiment surpris et ça m’avait aussi donné soif. Il y avait sûrement des distributeurs au premier étage donc je décidai de partir faire un tour là-bas avant de retourner dans ma chambre. Mais près de la machine, je vis trois professeurs. Mlle. Chabashira, Mlle. Hoshinomiya de la classe B et M. Mashima de la classe A. Ils étaient assis sur le canapé. Cette zone n’était pas interdite aux élèves mais il y avait un bar réservé aux adultes. Ce n’était donc pas une zone très fréquentée. J’étais venu pour une simple canette, mais il semblerait que j’eus l’opportunité d’obtenir des informations. J’effaçai ma présence et me rapprochai discrètement d’eux.

  1. Mashima — Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas été réunis comme ça.

Mlle. Hoshinomiya — C’est le destin, nous avons choisi cette voie après tout.

  1. Mashima — On avait dit qu’on ne parlerait plus de ça !

Mlle. Hoshinomiya —  D’ailleurs je t’ai vu avec une femme l’autre fois. As-tu une nouvelle copine ?

  1. Mashima — Parlons plutôt de toi, Chie. Que s’est-il passé avec ton ex ?

Mlle Hoshinomiya — Ahah, j’ai rompu avec lui au bout de deux semaines. Tu vois, je suis le genre de fille qui couche avec un homme et qui se sépare avant que la relation ne devienne sérieuse.

Mlle. Hoshinomiya — Ahh, mais je ne le ferais pas avec toi, Mashima-kun. Tu es mon meilleur ami après tout, je ne voudrais pas briser notre amitié. M. Mashima —  Rassure-toi, tu n’es pas mon genre.

Mlle. Hoshinomiya —  Uwaaa, je suis sous le choc.

Mlle. Hoshinomiya but son verre de whisky d’une traite contrairement à Mlle. Chabashira qui le sirotait doucement comme si c’était un cocktail.

Mlle. Chabashira — Plus important, que vas-tu faire, Chie ?

Mlle. Hoshinomiya — De quoi est-ce que tu parles ?

Mlle. Chabashira — Souvent, nous mettons les leaders de chaque classe chez les Dragons.

Mlle. Hoshinomiya — Je sais ce que je fais. Que ce soit l’état d’esprit ou les notes, Ichinose-san est la meilleure de ma classe. Mais la probabilité de réussite ne peut pas être déterminée seulement par des facteurs numériques. J’ai décidé de poser des obstacles afin qu’elle puisse les surmonter. En plus, la mettre chez les Lapins lui va bien. Un lapin c’est mignon, non ? Il fait honk honk, comme Ichinose-san.

Mlle. Chabashira — Si tu le dis.

  1. Mashima — Ce que tu dis a du sens, mais je suis sûr qu’il y a des raisons cachées. Je veux juste éviter que tu fasses des jugements selon des rancunes personnelles.

Mlle. Hoshinomiya — Tu parles toujours de ce qui est arrivé il y a dix ans ? Je pensais qu’on était passé à autre chose.

  1. Mashima — Je me demande bien si tu n’es pas le genre à être hypocrite. Tu n’es satisfaite que lorsque tu as une longueur d’avance. J’imagine que c’est pour ça que tu as mis Ichinose chez les Lapins ?

Mlle. Chabashira — Qu’est-ce que ça veut dire ?! Explique-toi, Hoshinomiya.

Mlle. Hoshinomiya — J’ai pensé qu’Ichinose avait besoin d’une petite leçon donc je l’ai retirée des Dragons. Quand on parle du loup… D’ailleurs, Saechan, tu avais jeté ton dévolu sur Ayanokôji-kun, non ? Ce n’est qu’une simple coïncidence, vraiment, si Ichinose se trouve dans le même groupe que lui. Mais je me rappelai bien que lors de l’examen sur l’île, tu étais bien contente qu’il soit devenu leader à la place d’Horikita. Cela a attisé ma curiosité.

Mlle. Chabashira — Cela n’a aucun rapport.

  1. Mashima hocha quand même la tête comme s’il était convaincu. Puis il parla à Mlle Hoshinomiya d’une façon stricte.
  2. Machima — Il n’y a pas vraiment de règles concernant les placements dans les groupes, mais nous devons quand même respecter une certaine éthique et j’aimerais ne pas avoir à signaler l’erreur d’une collègue.

Mlle Hoshinomiya — Tu ne me fais pas confiance, d’accord. Mais ne t’attaque pas à moi. Sakagami-sensei est tout aussi à blâmer ! Déjà que la classe C a mauvaise réputation alors maintenant qu’on sait que ce n’est pas Ryuuen-kun qui aurait dû être chez les Dragons, mais quelqu’un d’autre…

  1. Mashima — Faut dire aussi que les élèves de cette année sont très prometteurs.

J’avais maintenant glané pas mal d’informations sur l’examen, alors je décidai de me replier. Si je restais, j’encourrais gros. Je savais maintenant qu’Ichinose avait

été envoyée en tant qu’éclaireuse. Il semblerait qu’on me soupçonne déjà et qu’on essaie de me neutraliser.

 

 

Comment

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x

Options

ne fonctionne pas avec le mode sombre
Réinitialiser