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Traducteur: TheCounterspell
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L’éthique de travail de Nana ne permettait aucun favoritisme, d’aucune sorte. Lith était peut-être son futur apprenti, mais Tista devait attendre son tour comme tout le monde.
Lith n’avait jamais été aussi heureux d’être coincé dans une file d’attente depuis l’époque où il était étudiant à l’université et qu’il utilisait chaque seconde pour réviser ses matières les plus faibles.
Tant de choses à lire et si peu de temps. Mieux vaut bûcher sur la magie des ténèbres et la magie lumineuse puisque ce sont les seuls éléments en dehors de la physique telle que je la connais. Dans le meilleur des cas, il me faudra des années pour remettre la main sur un livre, et il n’y a que peu de choses que je puisse apprendre en autodidacte.
Quand ce fut leur tour, il étudia attentivement la façon dont la guérisseuse effectua la magie de lumière : « Vinir Rad Tu. »
Il s’agissait du même sort de détection de force vitale qu’elle avait utilisé sur lui il y a trois ans, mais cette fois, il avait une meilleure compréhension de la magie et un bien meilleur point de vue.
En étant à côté de Nana, Lith pouvait apprécier chaque geste et mouvement de main qu’elle utilisait pour amplifier l’efficacité du sort. La lumière enveloppa le corps de Tista, devenant rapidement grise autour de sa poitrine, soulignant clairement la forme de ses poumons.
« J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle est que l’état de Tista est le même que d’habitude, il n’y a aucun signe de dégénérescence cette fois-ci. La mauvaise nouvelle est que son état ne semble pas s’améliorer non plus. »
« “J’ai peur qu’elle reste comme ça pour toujours. Plus elle grandira, moins il y aura de chances que son corps puisse s’arranger d’une manière ou d’une autre. »
L’air de la pièce est devenu lourd. Une vie de malade était à peine mieux que pas de vie du tout.
Lith était si choqué qu’il en a complètement oublié les livres. Le monde entier ne signifiait rien pour lui s’il ne pouvait pas le partager avec les trois seules personnes qu’il aimait et en qui il avait confiance.
Ils sont sortis de la maison de Nana l’esprit abattu et sont rentrés chez eux en silence.
Une fois arrivée, Elina a partagé la mauvaise nouvelle et a cherché les bras de Raaz avant de se mettre à pleurer. Un par un, toute la famille éclata en sanglots, se serrant les uns contre les autres en signe de réconfort.
Lith s’est laissé aller pleurer, maudissant le destin cruel qui s’était abattu sur sa sœur.
A quoi sert la magie si je suis si impuissant ? Pourquoi est-ce que je continue à me réincarner, simplement pour remplacer un enfer par un autre ? Est-ce de la malchance ou est-ce ma faute ? Se pourrait-il que, dans une vie antérieure, j’aie commis un acte si atroce que tous ceux que j’aime sont maintenant maudits ? Pensa-il effrayé.
Les jours suivants, Lith n’a cessé de remettre en question chacun de ses choix de vie, avant d’accepter le fait que les mauvaises choses arrivent. Tista était déjà malade quand il avait ressuscité pour la deuxième fois, ça ne pouvait pas être de sa faute.
Ayant été accepté comme apprenti de Nana, il pouvait maintenant pratiquer ouvertement la magie. Très vite, il s’est montré capable de nettoyer toute la maison tout seul, soulageant ainsi sa mère et ses sœurs de toutes leurs tâches.
Grâce à la magie des ténebres, nettoyer les plats et les chaudrons est devenu une question de minutes. Rien d’organique, qu’il s’agisse de résidus alimentaires ou de graisse, ne pouvait échapper à la transformation en poussière d’une simple étincelle d’énergie.
Il a également fait d’innombrables expériences avec la magie lumineuse, à la recherche d’un remède pour Tista. Mais tout ce qu’il a réussi à faire, c’est de maintenir ses symptômes à distance. Tista avait maintenant besoin de beaucoup moins de traitements de la part de Nana, mais elle était toujours prisonnière de son propre corps.
Ce qui a poussé Orpal à le détester de plus en plus.
‘Frimeur ! Comment suis-je censé profiter de ma vie avec lui qui me souffle constamment dans le cou ? Non seulement Sangsue partage les tâches ménagères avec maman, mais il passe aussi beaucoup de temps avec Tista.’ Pensait Orpal.
Maman et papa l’ont toujours félicité pour son soi-disant talent et son intelligence. Maintenant, ils ne cessent de dire que Sangsue a permis à la famille d’économiser beaucoup d’argent en s’occupant lui-même de la santé de Tista.
Tout le monde s’en fout que je perde mon temps et ma sueur à faire tous les travaux de la ferme ! Mon Dieu, pourquoi l’avez-vous laissé vivre ? Pourquoi ne m’as-tu pas donné de talent ?
Sans tenir compte des sentiments de son frère, Lith ne s’en sortait pas beaucoup mieux. Sa puissance magique et sa compréhension du mana ne cessaient de croître, mais cela ne pouvait effacer le perpétuel goût d’échec qui l’accompagnait.
L’année suivante, il n’a pu ressentir aucune joie concernant la magie, chaque découverte était inutile, tout son pouvoir était vide de sens.
Et ainsi, il avait finalement quatre ans. La période entre quatre et six ans à Lutia était appelée “l’âge d’or”. Les enfants de cet âge étaient assez grands pour avoir une certaine liberté et trop petits pour être utiles dans les activités quotidiennes.
Ils étaient autorisés à jouer toute la journée sans se soucier du monde. C’était le moment idéal pour se faire des amis, se rapprocher de ses propres voisins et resserrer les liens entre les familles.
Le jour de son quatrième anniversaire, après que Lith ait terminé ses tâches ménagères, Rena le présenta à tous leurs voisins avant qu’ils rentrent chez eux.
Il était censé se socialiser et jouer, mais Lith avait d’autres plans. Aucun échec ou deuil ne pouvait lui faire oublier pour longtemps la faim qui le dévorait depuis qu’il avait à peine cinq mois.
La ferme de Raaz se trouvait à la limite ouest des terres agricoles de Lutia, à un peu moins d’un kilomètre de distance des grands bois connus sous le nom de Trawn.
Malgré son nom prétentieux, ce n’était pas un endroit particulièrement dangereux. Les habitants des villages voisins dépendaient de la forêt comme principale source de bois pour leur vie quotidienne.
Trawn était également abondant en faune et en flore, de sorte que ceux qui étaient assez audacieux et chanceux allaient chasser toute l’année, à la recherche de viande précieuse, de fourrure chaude, ou des deux.
Il était impossible de rencontrer des monstres dans la forêt à moins d’aller à plusieurs kilomètres de profondeur, et comme il n’était pas nécessaire d’explorer la forêt en détail, les zones intérieures restaient des territoires inexplorés.
Il y avait une raison pour laquelle Lith n’avait jamais pratiqué les arts martiaux dans le nouveau monde, pas même le jeu de jambes. La pratique constante de la magie exigeait beaucoup d’énergie, et son foyer ne disposait pas des ressources nécessaires à son entraînement.
Lith était déjà plus maigre que tous ses frères et sœurs, un effort de plus et il se transformait en un tas d’os. Il avait besoin de nourriture.
Mais étant un garçon de la ville, il ne connaissait rien à la boucherie. Il avait besoin d’un professeur et c’est pourquoi il s’est dirigé vers la maison de Selia Fastarrow, le seul chasseur parmi leurs voisins.
Le problème, c’est que je ne sais pas comment faire pour qu’elle m’aide. Je suis encore trop petit pour un apprentissage, et même si je ne l’étais pas, il est peu probable qu’elle n’ait pas entendu parler de l’offre de Nana.
Elle n’a rien à gagner à m’aider. Je peux seulement espérer qu’elle soit une femme gentille et bienveillante.
La maison de Selia était une maison en bois à un étage, beaucoup plus petite que celle de Lith, d’une soixantaine de mètres carrés. Il n’y avait ni poulailler ni grange. À l’exception de l’espace situé à proximité de la maison, les champs étaient incultes, pleins de mauvaises herbes, d’herbes hautes et de ce que le vent avait planté au fil du temps.
Elle n’a manifestement aucun intérêt pour l’agriculture et l’élevage, et c’est une bonne nouvelle. Cela signifie que son entreprise est assez bonne. Je me demande ce qu’il y a dans la remise près de la maison. Elle est presque aussi grande que la maison elle-même.
Lith frappa à la porte, ses entrailles étaient nouées par la nervosité. La porte s’est ouverte presque immédiatement
“Encore toi ? Tu es perdu ou quelque chose comme ça ?”Selia était une femme d’une vingtaine d’années, mesurant 1,7 mètre. Sa peau était bronzée par les années d’exposition au soleil. Ses cheveux noirs étaient gardés courts avec une coupe de cheveux identique aux standards militaires sur Terre.
Elle aurait pu être considérée comme très mignonne, mais sa petite poitrine, associée à son regard vif et à son attitude rude, la rendait plus virile que la plupart des agriculteurs.
Elle portait une veste de chasse en cuir sur une chemise verte, un pantalon cargo vert et des bottes de chasse marron avec une semelle extérieure souple, pour limiter le bruit fait en se déplaçant.
« Bonjour Mlle Fastarrow, j’ai besoin d’une faveur. Pourriez-vous m’apprendre à dépouiller et à vider les animaux ? »
Selia leva un sourcil. « Pourquoi ? »
« Parce que j’ai faim » N’ayant aucun moyen de pression sur elle, Lith avait décidé que la vérité était la meilleure politique. « J’ai eu faim assez longtemps pour oublier la sensation de satiété. Je sais que je peux chasser, mais je sais aussi que si elle n’est pas manipulée correctement, la viande se détériore et n’est pas comestible. »
« Non tu m’as mal compris, je te demande pourquoi je devrais t’aider ? Qu’es ce que j’y gagne ? » Maintenant, elle se triturait les sourcils.
« Que voulez-vous ? » Demanda Lith en refoulant l’envie de la tuer lentement et douloureusement. Il avait assez faim pour la considérer comme une proie.
« Honnêtement, je ne crois pas qu’un avorton qui atteint à peine ma ceinture puisse chasser quoi que ce soit, pas même un rat. Et comme l’enseignement est une perte de temps, il exige une compensation »
Elle se gratta le menton à la recherche d’un accord assez mauvais pour faire fuir la peste. Elle n’avait jamais voulu d’enfant, encore moins d’être obligée de s’occuper de celui d’un autre…
« Si tu veux apprendre de moi, tu dois d’abord apporter ici des proies. Si tu te plantes en jouant au boucher, tu vas ruiner ma marchandise, gaspillant à la fois mes biens et mon temps. Alors voici mon marché : quoi que tu m’apportes, je t’apprendrai à le dépecer et à le vider. Mais la moitié est à moi pour la peine. C’est à prendre ou à laisser. »
On repasseras pour la femme gentille et bienveillante. C’est du vol, une arnaque. Pensait Lith.
« Je prend l’offre. Combien de temps comptez vous rester à la maison ? » Répondit-il.
« Je serai ici toute la journée. J’ai beaucoup de travail à faire. Pourquoi ? »
« Parce que quand je reviendrai avec ma proie, j’aurai besoin de votre aide. N’oubliez pas notre accord. »
Lith se retourna, se dirigeant vers les bois. En voyant le petit avorton jouer les durs alors qu’il n’avait ni arc, ni piège, ni même un simple sac pour le gibier, Selia ne put s’empêcher de rire aux éclats.
Du moins jusqu’à ce que la porte lui claque au visage, l’envoyant les fesses en premier sur le sol. Après s’être levée, elle est allée à la fenêtre la plus proche.
Lith était toujours à la même place, mais son visage était tourné vers sa porte. Ses yeux brillaient dans la faible lumière de l’aube.
Après être arrivé à l’orée du bois, il activa le sort de lumière ‘Vision de vie’. C’était l’un des nombreux sorts qu’il avait créés après une année de pratique. En imprégnant ses yeux de magie lumineuse, Lith était capable de voir les êtres vivants en couleur, alors que le reste du monde était transformé en nuances de gris.
Plus leur force vitale est forte, plus la lumière qu’ils émettent est grande et brillante. Ainsi, il pouvait facilement repérer les animaux, même s’ils se cachaient sous terre, dans les buissons ou à l’intérieur d’un arbre.
Lith n’avait pas besoin de chasser quelque chose de gros. Tant que c’était de la viande, c’était une proie parfaite.
La plupart des animaux s’enfuyaient dès qu’il s’approchait trop près, mais pas tous. Les oiseaux et les écureuils perchés sur les branches des arbres se sentaient en sécurité. Malheureusement pour eux, la magie spirituelle de Lith avait atteint une portée de plus de vingt mètres.
Ils étaient tous à sa portée.
Il lui suffisait de tendre sa main ouverte vers sa proie, puis de la serrer et de la tourner pour leur briser le cou. En moins de vingt minutes, il a tué deux oiseaux à plumes et deux écureuils.
‘Je pourrais en attraper plus, mais je veux payer cette harpie le moins possible.’ Pensait Lith.
Bon sang ! J’aimerais pouvoir demander à mon père. Notre ferme a un poulailler, nous mangeons du poulet, donc il doit savoir comment le dépecer. Mais si je fais ça, alors je serai obligé de partager ma chasse à parts égales.
Et s’il y a quelque chose que je déteste plus que d’être volé par cette harpie, c’est l’idée qu’Orpal et Trion aient la même quantité de viande que moi. Ou pire, étant plus âgés, ils pourraient en recevoir encore plus.
J’ai chassé ce gibier ! Cette viande est à moi, à moi ! Ils n’auront le droit de manger mes restes que quand et si je le veux !
Quand Lith est arrivé à la porte de Selia, il s’était calmé et avait réussi à cacher sa rage derrière son visage d’homme d’affaires. Il a pris quelques respirations profondes avant de frapper à nouveau.
Quand Selia l’a vu, elle était sur le point de se moquer de lui et de le traiter de lâcheur pour avoir abandonné en moins d’une heure. Mais alors, Lith lui a montré sa prise, faisant mourir dans sa gorge son discours : « Ne jamais sous-estimer la difficulté du travail d’un chasseur. »