Traducteur: TheCounterspell
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Une fois la bataille terminée, tout le monde s’est laissé tomber sur le sol, pouvant enfin se détendre. Malgré la victoire, il n’y avait pas de place pour la joie ou la célébration. Les bois de Trawn porteraient une cicatrice qui prendrait des mois, voir des années, à guérir.
Les trois rois discutaient déjà de la manière de réorganiser les frontières de leurs zones d’influence, afin d’éviter que les futures pénuries alimentaires ne les touchent trop durement.
Lith, lui, réfléchissait encore aux souvenirs des jeunes ours, comparant leurs vies. Ce n’est que parce qu’il était né dans une bonne famille qu’il n’avait pas fini par être obsédé par le pouvoir, pouvant se permettre de prendre soin de son corps.
À sa place, avec la concurrence féroce de la nature sauvage, il aurait pu être tenté de faire de même. Toute sa vie jusqu’à ce point avait été une énorme évaluation des risques/récompenses aussi, Lith avait simplement été plus chanceux.
C’était la deuxième fois en un seul jour que sa victoire était creuse. Il a commencé à se sentir déprimé, ce qui fit que la montée d’adrénaline s’était dissoute beaucoup plus vite. Bientôt, l’épuisement fit son œuvre, il avait besoin d’un vrai sommeil.
Avant de rentrer chez lui, il pensait qu’il y avait encore des choses qu’il devait faire. D’abord, il a donné au Shyf un sanglier entier à manger, puis il entrepris de guérir sa patte atrophiée.
Il n’avait pas pu le faire avant, car la fatigue liée à la récupération d’une telle blessure, ajoutée à son état déjà affaibli par la bataille prolongée, aurait fait s’évanouir le Shyf.
Être un guérisseur était presque une seconde nature pour Lith à ce moment-là. Il voulait aussi que quoi qu’il arrive ensuite dans les bois, ils l’affrontent seuls. Lith avait déjà assez à faire, il voulait juste dormir et manger pendant une semaine.
Ensuite, il a enfin pu exprimer non pas à une, mais à trois puissantes bêtes magiques, ses doutes sur la magie de niveau quatre avec un exemple concret.
Avec l’énergie qu’il lui restait, Lith a exécuté avec de la vraie magie une version réduite du sort Doigt du Dieu de la Foudre de niveau quatre, tissant ensemble la magie du feu et de l’air pour conjurer une petite sphère de plasma.
« Le vrai truc serait plus gros, donc ferait plus de dégâts mais demanderait aussi beaucoup plus d’énergie. » De par sa nature, le plasma était très volatile et se dispersait à la moindre erreur.
Il pouvait certes générer des températures de l’ordre du millier de degrés, et même frapper avec une précision chirurgicale, mais il était incroyablement lent à se déplacer, et Lith ne pouvait pas trouver une seule utilisation pratique justifiant de dépenser autant de mana dans un seul sort.
Le Ry et le Shyf étaient tous deux des maîtres naturels de la magie de l’air, ils pouvaient donc immédiatement comprendre la nature du sort et ses effets sous-jacents.
« C’est tout simplement inutile ! » a lâché le Faucheur.
« C’est le plus joli gaspillage de mana que j’ai jamais vu. »Rit le Protecteur.
« Avec beaucoup moins d’énergie et d’efforts, tu pourrai effacer un acre entier de bois. Je pense que le problème ne vient pas de toi, mais du sort lui-même.
Selon ce que tu m’a dit dans le passé, les humains se jugent si stupides et indignes de confiance qu’ils ont divisé la magie en étapes, ou en niveaux, comme tu les appele.
A mon avis, soit l’humain qui a inventé cette merde avait plus de temps libre que de cervelle, soit le sort est incomplet exprès. »
« Les humains sont-ils vraiment si idiots ? Pour apprendre à leurs petits comment tuer une proie mais pas où sont les meilleures parties ? » Le Shyf était sidéré par cette idée.
« Encore une impasse. » Soupira Lith, sa dépression s’aggravant. Le Ry était son dernier espoir de comprendre cette énigme magique.
« Je suis désolé, Fléau. »Dit le Ry. « Mais nous, les bêtes magiques, avons une vision beaucoup plus pratique de la magie, la plupart de tes problèmes humains sont soit insensés soit idiots pour moi. Un autre problème est que nous ne sommes pas capables de contrôler l’énergie du monde entier.
Seules les bêtes de niveau roi peuvent manipuler deux éléments, alors que les sorts les plus complexes que tu m’a montrés en utilisent parfois trois ou plus.
J’aimerais t’aider davantage, mais entre mes devoirs et cette tragédie, je dois me concentrer pour éviter la famine imminente. Désolé. »
Le Ry et le Shyf le quittèrent, commençant à discuter de la manière de faire survivre toute la forêt, notamment la zone la plus endommagée par Flétrissure, à l’hiver prochain.
Lith sentait son mal de tête empirer de seconde en seconde, aussi après leur avoir dit au revoir, il commença à avancer aussi vite qu’il le pouvait vers chez lui.
‘Tant pis pour la deuxième et la troisième opinion. Si le Ry a raison, alors je suis dans la merde jusqu’au cou. Pas d’académie signifie pas de sorts de niveau cinq, ce qui implique que je serai coincés avec le niveau trois comme principale source d’inspiration.
Sans compter que je n’envie vraiment pas tous ces étudiants qui perdent une année entière de leur vie à pratiquer des sorts incomplets.’
« En fait, j’ai réfléchi à ce que Nana nous a dit, et je pense qu’il y a encore une autre possibilité. Peut-être que les niveaux quatre et cinq sont si rares à se présenter parce qu’ils sont strictement liés à une spécialisation de mage. » Suggéra Solus
« Et si le Doigt du dieu de la foudre n’était pas un sort offensif, mais plutôt une source d’énergie pour les constructions ? Ou peut-être est-ce le seul moyen de graver des runes magiques dans les matériaux les plus durs utilisés pour les armes ou les armures.
Nous ne savons rien de l’art de de la Forge, du Brassage de Potions ou de tout ce qui est lié à la magie indirecte. »
« Putain! Tu a probablement raison. Et cela appuis encore plus sur notre problème. Il semble que nous soyons destinés à vivre quatre années très inintéressantes. »
Dès son retour à la maison, Lith refusa de bouger le petit doigt, allant se coucher juste après le dîner, espérant que le lendemain lui apporterait de bonnes nouvelles.
Pourtant, les mois passèrent, son anniversaire se rapprochait et la date limite pour s’inscrire dans n’importe quelle académie aussi.
Pendant ce temps, le Comte Lark n’était pas resté les bras croisés. Il avait saisi toutes les occasions, tous les prétextes, aussi minces soient-ils, pour obtenir une audience avec le Roi et, en cas d’échec, il s’était frayé un chemin dans la hiérarchie de la Cour.
Il avait tellement harcelé tout le monde que beaucoup se cachaient en sa présence, ou faisaient semblant de ne pas le remarquer pour ne pas lui donner l’occasion de persister dans sa course folle.
Mais le Comte était un homme têtu, il connaissait les règles et les règlements sur le bout des doigts, et en utilisant de vrais problèmes liés au Comté de Lustria comme couverture, il n’y avait que peu de choses qu’ils pouvaient faire pour l’éviter sans créer un dangereux précédent.
Il était capable d’endurer de longues heures d’attente comme si ce n’était rien, et d’avoir encore l’énergie de plaider sa cause jusqu’à ce que ses hôtes soient si épuisés que pour se débarrasser de lui, ils devaient au moins promettre de considérer ses revendications.
Quand la directrice Linnea a parlé de vouloir envoyer un message politique, ce n’était pas le résultat qu’elle espérait. Bientôt, son nom, ainsi sa lignée jusqu’à la septième génération, serait associé à des malédictions et des jurons ingénieux.
Le comte Lark est rapidement devenu un sujet brûlant, recevant le même degré d’attention qu’une inondation ou une peste imminente.
D’une manière ou d’une autre, il avait atteint une partie de son objectif, en faisant discuter toute la Cour sur les implications possibles que la nouvelle règle de la directrice Linnea pourrait avoir à l’avenir.
« Cela valait-il vraiment la peine de barrer la route à un magicien prometteur à cause de la façon dont il avait appris ses sorts ? Pourquoi punir la victime d’un crime juste parce qu’elle a demandé à faire respecter la loi ? »
« La directrice d’une institution aussi importante devait-elle être autorisée à changer les règles d’admission sur un coup de tête, sans aucune forme de contrôle ? »
Une discussion aussi importante avait besoin de temps, mais surtout de paix et de tranquillité, et la Cour a donc décidé à l’unanimité d’accorder à la Marquise Distar, la véritable souveraine du Comté de Lustria, des pouvoirs extraordinaires, pour se confronter au Comte Lark comme elle l’entendait.
En d’autres termes, elle s’est retrouvée avec le plus petit bout du bâton.
Le comte Lark allait l’importuner sans relâche, tandis que tous les autres vivraient heureux pour toujours.
La Marquise Distar avait déjà sa part d’ennuis, Trequill Lark n’était que la cerise sur le gâteau. Elle a songé plus d’une fois à utiliser sa nouvelle autorité pour le décapiter, mais son bon sens et tous ses conseillers personnels l’en ont empêchée.
Lark était l’un de ses meilleurs serviteurs. Il était sincère, ne lésinait pas sur les impôts, n’avait jamais eu d’affaires sordides qu’elle avait été obligée d’étouffer.
Sans compter que sous sa main directrice, le comté de Lustria était florissant depuis plus de vingt ans, sans que la Marquise et sa mère avant elle n’aient jamais eu à bouger le petit doigt.
C’était une machine bien huilée, et honnête de surcroît ! Le remplacer lui causerait bien plus d’ennuis que de l’exécuter.
Ayant le dos au mur, elle décida que l’honnêteté était la meilleure politique. Lark était un père aimant, après tout. Il comprendrait peut-être sa position et la laisserait tranquille s’il savait la vérité.
Après lui avoir accordé la trente-septième audience en moins de trois mois, elle expliqua au comte Lark la situation critique de sa famille.
« Comme vous le savez, plus on monte en grade, plus on s’attire des ennuis. Il y a quelques semaines, ma famille a été victime d’une tentative de meurtre. Grâce aux mesures de sécurité dont nous nous sommes entourés, elle a échoué. Mais cela n’est pas passé sans conséquences.
L’un des assaillants, a réussi à atteindre ma fille. Ses protections magiques ont pris le gros du coup, réduisant un coup mortel à un peu plus qu’une piqûre d’épingle. »
« Tout est bien qui finit bien. » Commenta le Comte.
La Marquise dut se retenir de le gifler, se frottant le front à la place, essayant de se calmer.
« J’aurais bien aimé ! A cause de cette piqûre d’épingle, ma fille a été maudite. »
« Maudite ? » Le monocle du comte Lark a sauté de son orbite sous l’effet de la surprise.
D’habitude, il se serait moqué d’un concept aussi absurde. Durant toutes ses années d’exploration des curiosités magiques du monde entier, il n’avait rencontré de malédiction que dans les histoires à dormir debout qu’il lisait à ses enfants.
Mais le regard de la Marquise l’incita à remettre son monocle en place et à la laisser continuer.
« Oui, maudit. Je ne le croirais pas moi-même si je ne l’avais pas vu de mes propres yeux. Lorsque le guérisseur a essayé de l’aider, en empêchant une cicatrice, au lieu de disparaître, la blessure s’est agrandie.
J’ai tout essayé, j’ai appelé des maîtres alchimistes renommés, des guérisseurs, des femmes médecins, des chamans. Rien n’a fonctionné.
Maintenant, la seule chose qui maintient ma fille en vie est la consommation constante de potions et l’aide de mon magicien personnel, Ainz.
Comme vous le savez, il est considéré comme un génie, peut-être le meilleur diplômé de l’académie du Griffon Noir.
Pour aggraver les choses, quand les assaillants ont compris qu’ils n’avaient aucune chance de s’échapper, ils ont choisi de se faire exploser, détruisant toutes les preuves. Il n’y avait personne à interroger, plus rien à examiner pour comprendre ce qu’ils avaient fait ! »
‘C’est fantastique !’ pensa le comte.
« C’est terrible ! »Le Comte a réellement dit, en gardant son meilleur visage de deuil.